Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome32.djvu/299

Cette page n’a pas encore été corrigée

ACTE I, SCÈNE III. 289

SCÈNE IL

Vers 1. Faut-il mourir, madame? Et, si proche du terme,

Votre illustre inconstance est-elle encor si ferme? etc.

Cette seconde scène tient au delà de ce que la première a promis. Un Domitian qui veut mourir d'amour ! C'est mettre un hochet entre les mains de Polyphèmc. Et qu'est-ce qu'une illustre inconstance proche du terme, si ferme que les restes d'un feu si fort se promettent la mort de Domitian dans quatre jours? Ces paroles, ces tours inintelligibles qui sont comme jetés au hasard, forment un étrange discours. La princesse Henriette joua un tour bien san- glant à Corneille quand elle le fit travailler à Bérénice.

On ne voit que trop combien la suite est digne de ce com- mencement. Quels vers que ceux-ci, et que de barbarismes ! Ce n'est pas un mal qui vaille en soupire)-; un choix qui charme avec un peu d'appas qu'on met si bas ; et tous ces compliments ironiques que se font Domitian et Domitie ; et cette beauté qui n'a écouté aucun des soupirants qui l'accablaient de leurs regards mourants; et son cœur qui va tout à Domitian quand on le laisse aller.

On est étonné qu'on ait pu jouer une pièce ainsi écrite, ainsi dialoguée et raisonnée.

Tous ces raisonnements de Domitie ne peuvent être écoutés. Comme la passion du trône est la première, elle est la dominante : ce n'est pas qu'elle ne se violente à trahir l'amour; mais il est juste que des soupirs secrets la punissent d'aimer contre ses intérêts.

Il semble que, dans cette pièce, Corneille ait voulu en quel- que sorte imiter ce double amour qui règne dans VAndromaque, et qu'il ait tenté de plier la roideur de son caractère à ce genre de tragédie si délicat et si difficile. Domitian aime Domitie, Titus aime aussi Domitie un peu. On propose Bérénice à Domitian, et Bérénice est aimée véritablement de Titus. Avouons qu'on ne pouvait faire un plus mauvais plan.

SCÈNE III.

Vers 1. Elle se défend bien, seigneur, et dans la cour...

— Aucun n'a plus d'esprit, Albin, et moins d'amour, etc.

Il s'agit bien là d'esprit ! Et cette adresse à défendre une mauvaise émise, et la flamme qui applique cette adresse au secours. Quels vains et malheureux propos ! Peut-on dire en de plus mauvais vers des choses plus indignes du théâtre tragique ?

32. — Comm. Mr. Corneille. II. 19

�� �