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ACTE II, SCÈNE II. 239

Mairel avait ou l'art de tenir les esprits en suspens : on ne sali d'abord chez lui si Massinisse pardonnera ou non à sa captive.

C'est beaucoup que, dans le temps grossier où .Maint écrivait, il devinât ce grand art d'intéresser. Sa pièce était à la vérité rem- plie de vers de comédie et de longues déclamations: mais ce goût subsista très-longtemps, et il n'y avait qu'un petit nombre d'es- prits éclairés qui s'aperçussent de ces défauts. On aimait encore, ainsi que nous l'avons remarqué souvent 1 , ces longues tirades raisonnées, qui, à l'aide de cinq ou six vers pompeux et de la déclamation ampoulée d'un acteur, subjuguaient l'imagination d'un parterre, alors peu instruit, qui admirait ce qu'il entendait et ce qu'il n'entendait pas. Des vers durs, entortillés, obscurs, passaient à la faveur de quelques vers heureux. On ne connais- sait pas la pureté et l'élégance continue du style.

La pièce de Mairet subsista donc, ainsi que plusieurs ouvrages de Desmarets, de Tristan, de Duryer, de Rotrou, jusqu'à ce que le goût du public fût formé 2 .

La Sophonisbe de Corneille tomba ensuite comme les autres pièces de tous ces auteurs; elle est plus fortement écrite, mais non plus purement, et, avec l'incorrection et l'obscurité conti- nuelle du style, elle a le grand défaut d'être absolument sans intérêt, comme le lecteur peut le sentir à chaque page.

SCÈNE I.

(Fin déjà scène.) On sent dans cette scène combien Éryxe est froide et rebutante.

J'aime donc Massinisse, et je prétends qu'il m'aime; Je l'adore, et je veux qu'il m'adore de même... Pour juste aux yeux de tous qu'en puisse être la cause, Une femme jalouse à cent mépris s'expose. Plus elle fait de bruit, moins on en fait d'état.

Est-ce là une comédie de Monfleury 3 ? Est-ce une tragédie de Corneille?

SCÈNE II.

Cette scène est aussi froide et aussi comiquement écrite que la précédente. Massinisse est non-seulement le maître de la ville,

1. Voyez tome XXXI, page 294.

2. C'est-à-dire les Visionnaires, Mariamne, Aicinoë, Vencesïas et Saint Genest.

3. Auteur de la Femmejuge et partie, de Martin Braillard, du Cocu volon- taire, etc.: &40-1685.

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