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ACTE IV, SCENE IV. 467

SCÈNE IV.

N'ers I César, prends garde à toi.

Que cette scène répare bien la précédente ! Que cette géné- rosité de Cornélie élève l'Ame ! Ce n'est point de la terreur et de la pitié ; mais c'est de l'admiration. Corneille est le premier de tous les tragiques du monde qui ait excité ce sentiment, et qui en ait l'ait la base de la tragédie. Quand l'admiration se joint à la pitié et à la terreur, l'art est poussé alors au plus haut point où Tesprit puisse atteindre. L'admiration seule passe trop vite. Boileau dit :

Inventez des ressorts qui puissent m'attaclier '.

Que ceux qui travaillent pour la scène tragique aient toujours ce précepte gravé dans leur mémoire.

��Vers 1 2. Mettant leur liaine bas

��Mettre bas ne se dit plus, comme on l'a déjà observé-, et n'a jamais été un terme nol)le.

Vers 14. Quoi que la perfidie ait osé sur sa trame, 11 vit encore en vous.

On dit bien la trame de la vie : cela est pris de la fable allégo- rique des Parques ; mais comme on ne dirait pas le fd de Pompée, on ne doit point dire non plus la trame de Pompée, pour signifier sa vie.

Vers 26. Mais avec cette soif que j'ai de ta ruine,

Je me jette au-devant du coup qui t'assassine.

Plusieurs critiques prétendent que Cornélie en dit trop, qu'elle ne doit point montrer tant de soif de la ruine d'un homme qui vient de venger son époux ; qu'elle retourne ce sentiment en trop de manières ; que la grandeur vraie ou apparente de ce sentiment est affaiblie par trop de déclamation et par trop de sentences ; qu'elle ne devrait pas même dire à César : Le sang de mon époux a rompu tout commerce entre nous, parce qu'il semble, par ces mots, que César ait tué Pompée.

Je crois qu'il est important de remarquer que si Cornélie

1. Art poétique, III, 'iU.

2. Il est à croire que Voltaire a supprimé, lors d'une révision de sou travail, la première observation sur les mots mettre bas, dont il parle ici. Je no l'ai i)as trouvée dans l'édition de 1764. (B.)

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