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332 REMARQUES SUR CIXNA.

Vers 77. Et vous devez aii\ dieux compte do tout le sang Dont vous l'avez venge- pour monter à son rang.

Cela n'est pas français ; il a vengé César par le sniuj, et non du sang. Il fallait :

E( vous devez aux dieux compte de tout le sang Que vous avez versé pour monter à son rang.

Vers 79. N'en craignez point, seign(nir, les tristes destinées ; Un plus puissant démon veille sur vos années.

11 y avait d'abord :

Mais sa mort vous fait peur, seigneur; les destinées D'un soin bien plus exact veillent sur vos années.

Corneille a changé heureusement ces deux vers. Quelques personnes reprennent les destinées; elles prétendent que la mort de César est le destin de César, sa destinée; et que ce mot au pluriel ne peut signifier un seul événement. Je crois cette cri- tique aussi injuste que fine, car s'il n'est pas permis à la poésie de dire destinées pour destins, grâces, faveurs, dons, inimitiés, haines, etc., au pluriel, c'est vouloir qu'on ne fasse pas des vers.

Vers 81. On a dix fois sur vous attenté sans effet;

Et qui l'a voulu perdre au même instant l'a fait.

On ne sait point à quoi se rapporte le perdre^; on pourrait entendre par ces vers : ceux qui ont attenté sur vous se sont perdus. 11 faut éviter ce mot faire, surtout à la fin d'un vers : petite re- marque, mais utile ; ce mot faire est trop vague ; il ne présente ni idée déterminée ni image ; il est lâche, il est prosaïque.

Vers 107. Votre Rome autrefois vous donna la naissance.

La tyrannie du vers amène très-mal à propos ce mot oiseux

autrefois.

Vers 109. El Cinna vous impute à crime capital La libéralité vers le pays natal.

Le pays natal n'est [)as du style noble. La libéralité n'est pas le mot propre, car rendre la liberté li'sa patrie est bien plus que libcralitas Augusti.

1. L'a voulu perdre, c'est-à-dire César.

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