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216 REMARQUES SUR LE CID.

SCÈNE IIJ.

UN PAGE.

C'est ici un défaut intolérable pour nous. La scène reste vide; les scènes ne sont point liées; l'action est interrompue. Pourquoi les acteurs précédents s'en vont-ils? Pourquoi ces nouveaux acteurs viennent-ils ? Comment l'un peut-il s'en aller et l'autre arriver sans se voir? Comment Chimène peut-elle voir l'infante sans la saluer ? Ce grand défaut était commun à toute TEiirope, et les Français seuls s'en sont corrigés. Plus il est difficile de lier toutes les scènes, plus cette difficulté vaincue a de mérite ; mais il ne faut pas la surmonter aux dépens de la vraisemblance et de l'intérêt. C'est un des secrets de ce grand art de la tragédie, inconnu encore à la plupart de ceux qui l'exercent. Non-seule- ment on a retranché cette scène de l'infante, mais on a supprimé tout son rôle, et Corneille ne s'était permis cette faute insuppor- table que pour remplir l'étendue malheureusement prescrite à une tragédie. Il vaut mieux la faire beaucoup trop courte : un rôle superflu la rend toujours trop longue.

Vers o. Et je vous vois pensive et triste chaque jour, Demander avec soin comme va son amour ^

Voilà une nouvelle excuse du titre de tragi-comédie; comme va son amour ! Qu'auraient dit les Grecs, du temps de Sophocle, à une telle demande ? Nous ne ferons point de remarque sur les défauts de ce rôle, qu'on a retranché entièrement.

SCÈNE IV.

Versl. Enfin vous rom])ortcz, et la faveur du roi

Vous élève en un rang (jui n'étoit dû qu'il moi.

La dureté, l'impolitesse, les rodomontades- du comte, sont, à la vérité, intolérables; mais songez qu'il est puni.

iV. B. Aujourd'hui, quand les comédiens représentent cette pièce, ils commencent par cette scène. Il paraît qu'ils ont très-

t. L'édition de lOGi porte:

Et dans son entretien je vous vois chaque jour Demander en quel point se trouve son umour.

2. Voyez tome XIX, page 47.

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