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qu’il soit plongé au plus profond de l’enfer avec le diable. Donné sous le consulat de Constantin et de Gallicanus. »

Ces lettres patentes étaient la plus juste récompense du service éternel que le pape Silvestre avait rendu à l’empereur. Il est dit, dans la préface de cette belle pièce, que Constantin, étant mangé de lèpre, s’était baigné en vain dans le sang d’une multitude d’enfants, par l’ordonnance de ses médecins. Ce remède n’ayant pas réussi, il envoya chercher le pape Silvestre, qui le guérit en un moment, en lui donnant le baptême.

On sait qu’après la décadence de l’empire romain, le Goth qui dressa ces lettres patentes n’avait pas besoin de supposer la signature de Constantin et du consul Gallicanus, qui ne fut jamais consul avec Constantin. C’était Jésu-Christ lui-même qui les devait signer, puisqu’il avait donné à Barjone Pierre les clefs du royaume du ciel, et que la terre y était visiblement comprise. On a prétendu que Jésu ne savait pas écrire ; mais ce n’est là qu’une mauvaise difficulté.

Nous n’avons jamais démêlé si c’est sur la donation de Constantin, ou sur celle de Jésu, que se fonda le pape Innocent III lorsqu’il se déclara roi d’Angleterre en 1213, et qu’il nous envoya son légat Pandolfe, auquel notre Jean sans Terre remit son royaume, dont il ne fut plus que le fermier, et dont il lui paya la première année d’avance. Il réitéra ce bail en 1214, et paya encore vingt-cinq mille livres pesant d’argent pour pot-de-vin du marché. Son fils Henri III commença son règne par confirmer cette donation à genoux. Nous étions alors dans un terrible abrutissement. Un grave auteur a dit que nous étions des bœufs qui labourions pour le pape, et que depuis nous avons été changés en hommes mais que nous avons gardé nos cornes, avec lesquelles nous avons chassé les loups ecclésiastiques qui nous dévoraient.

Au reste, on peut s’enquérir à Naples si la donation de Constantin a servi de modèle à la vassalité où les rois de Naples veulent bien être encore de la cour de Rome.


Chapitre XX. De la famille de Constantin, et de l’empereur Julien le philosophe[1].

Après Constantin, qui fut baptisé à l’article de la mort par l’arien Eusèbe, évêque de Nicomédie, et non par César-Auguste

  1. Voyez le Portrait de l’empereur Julien, tome XXVIII, page 2.