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J’enverrai la terreur de mon nom au-devant de vous ; j’exterminerai tous les peuples chez lesquels vous irez. J’enverrai d’abord des frélons et des guepes, qui mettront en fuite le hêvéen, le cananéen, l’éthéen[1]Les limites de votre terre seront depuis la.

    jaloux ; que ce livre ne parle jamais de Dieu que comme d’une divinité totale qui veut l’emporter sur les autres divinités ; et qu’on nous le représente comme les dieux des grecs, jaloux les uns des autres. La punition dont on menace la troisieme et quatrieme génération innocente d’un ayeul coupable, leur semble une injustice atroce ; et ils prétendent que cette vengeance exercée sur les enfants est une des preuves que les juifs n’ont jamais connu l’immortalité de l’ame et les peines après la mort, que vers le temps des pharisiens. C’est l’opinion du docteur Warburton, et de plusieurs théologiens qui ont abusé de leur science. Arnaud dit positivement la même chose, quoiqu’il n’en tire pas les mêmes conséquences que l’absurde Warburton. La peine de mort contre les magiciens prouve que les juifs croyaient à la magie : et comment n’y auraient-ils pas cru, s’ils avaient vu les miracles des magiciens de pharaon, et si Joseph avait fait des opérations magiques avec sa tasse ? On tire de la punition du coït avec les bêtes une preuve, que les juifs étaient fort enclins à cette abomination. On croit trouver de la contradiction entre l’ordre de mettre à mort ceux qui auront sacrifié aux dieux, et la défense de parler mal des dieux. On prétend que l’ordre de payer exactement les décimes, avant qu’il y eût des lévites et des décimes, est une preuve que cela fut écrit dans des temps postérieurs par quelques prêtres intéressés à la dixme. La vengeance exercée sur la quatrieme génération semblerait abolie dans le deutéronome : les peres ne mourront point pour leurs enfans, ni les enfans pour leurs peres . La premiere loi est une menace de Dieu ; et la seconde est une loi positive, qui suppose qu’on ne doit point faire pendre le fils pour le pere. Mais cette loi n’empêche pas que Dieu ne soit toujours supposé punir jusqu’à la quatrieme génération. La défense de dire du mal des dieux peut s’entendre des juges et des prêtres, qui sont souvent appellés dieux dans l’écriture.

  1. Dieu ne cesse de promettre aux juifs qu’il combattra pour eux, et que tout fuira devant eux. Il ajoute qu’il enverra des frêlons et des guepes pour leur préparer la victoire. Ce n’est point une figure dont se sert l’auteur sacré ; car Josué, avant de mourir, dit expressément que Dieu a envoyé devant eux des frêlons et des guepes. Le livre de la sagesse le dit aussi, longtemps après. L’histoire ancienne parle en effet de plusieurs peuples d’Asie, qui furent obligés de quitter leur pays où ces animaux s’étaient excessivement multipliés. On a dit même que les peuples de la Chalcide avaient été chassés par des mouches. On en a dit autant des peuples de la Mysie. Il y a eu deux provinces de Chalcide en Syrie. On ne sait dans laquelle le fléau des mouches put chasser les habitans. Il y a eu aussi plusieurs mysies dans l’Asie Mineure et dans le Péloponese. Il n’est pas croyable que les peuples d’aucune de ces provinces se soient laissés chasser par des mouches. Mais ce qui est fable dans la mythologie, peut devenir une vérité historique dans les livres saints, parce que Dieu faisait pour son peuple ce qu’il ne faisait pas pour des peuples profanes, qui lui étaient étrangers. Dieu promet ici aux juifs qu’il les rendra maîtres de tout le pays depuis la mer Méditerranée jusqu’à l’Euphrate ; or il y a vingt degrés en longitude, dans la latitude du trentieme degré, depuis la Méditerranée par la terrre de Chanaan