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or il y avait à Madian un prêtre qui avait sept filles, qui vinrent au puits pour prendre de l’eau et abreuver les troupeaux de leur pere. Il survint des pasteurs qui chasserent ces filles. Mosé prit leur défense et abreuva leurs brebis... [1] leur pere donna du pain et une de ses filles nommée Séphora en mariage à Mosé. Séphora enfanta Gerson, et ensuite enfanta élieser... longtemps après, le roi d’égypte mourut. Or Mosé paissait les brebis de Jéthro son beau pere près de Madian. Et ayant conduit son troupeau dans le désert, il vint jusqu’à la montagne de Dieu nommée Oreb. [2] Dieu lui apparut en forme de flamme au milieu d’un buisson ; et Mosé voyant que le buisson

    dit l’auteur, honteux de coucher avec la reine dont il avait été le domestique et le soldat, n’osa jamais prendre la liberté de lui rendre le devoir conjugal, sachant d’ailleurs que Dieu avait défendu aux israëlites d’épouser des étrangeres. Il eut toujours la précaution de mettre une épée dans le lit entre lui et la reine, afin de n’en point approcher. Ce manege dura quarante ans. Et, enfin, la reine ennuyée d’un mari qui mettait toujours une grande épée entre lui et elle, résolut de renvoyer Mosé et de faire couronner le fils qu’elle avait eu du roi Nécano. Les grands du royaume assemblés renvoyerent Mosé avec quelques présents, et il se retira alors chez Jethro dans le pays de Madian. Flavien Joseph raconte cette histoire tout autrement ; mais il assure que Mosé fit la guerre en éthiopie, et qu’il épousa la fille du roi. Remarquons seulement ici, que l’auteur juif cité ci-dessus rapporte beaucoup de miracles faits en éthiopie par Mosé, et par les deux fils du mage Balaam nommés Jannès et Mambrès dont il est parlé dans l’écriture. Remarquons encore que ce Jannès et ce Mambrès étaient les enfants d’un eunuque ; ce qui était le plus grand des miracles. Nous en verrons bientôt d’aussi incompréhensibles et de plus respectables. N’oublions pas d’observer que Flavien Joseph fait arriver Mosé dans le Madian sur le rivage de la mer rouge. Mais il est difficile de prouver qu’il y ait eu un pays nommé Madian sur cette mer. La sainte écriture ne parle que du Madian situé à l’orient du lac Asphaltide, ou lac de Sodome, qui est en effet l’un des déserts de l’Arabie pétrée. Ce fut là que Mosé roi d’éthiopie arriva seul à pied après une marche de trois cents lieues, s’il était parti d’éthiopie.

  1. tous les héros de l’antiquité marchent à pied quand ils n’ont pas de chevaux aîlés, et prennent toujours la défense des filles, qu’on leur donne souvent en mariage. On croirait que les auteurs de ces romans auraient copié les vérités hébraïques, s’ils avaient pu les connaître. Nous avons déjà remarqué* une grande conformité entre l’histoire sacrée du peuple de Dieu, et les fables profanes. (Id.)*Tome XXVI, page 202; XXVII, 89 ; XXVIII, 222
  2. on sait qu’Oreb n’est pas le mont Sinaï ; mais qu’il en est fort proche ; qu’il n’y a point d’eau au mont Sinaï, mais qu’au mont Oreb il y a trois fontaines : nous nous en rapportons aux voyageurs qui ont été dans ces pays affreux. Il est triste u’ils se contredisent presque tous. Flavien Joseph ne parle point de cette apparition de Dieu dans le buisson ardent. Il supprime ou il exténue souvent les miracles que les livres saints rapportent, et nous croyons aux livres saints plus qu’à lui. (Id.)