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Mosé étant devenu grand alla voir les hébreux ses freres, et ayant rencontré un égyptien qui outrageait un hébreux, il tua l’égyptien et l’enterra dans le sable. Le lendemain, craignant d’être découvert et que le roi ne le fît mourir, il s’en fut dans le pays de Madian, et s’assit auprès d’un puits. [1]

    paraît écrite du temps des rois, dit, que soixante ans après la mort de Joseph, le pharaon vit en songe un vieillard tenant en main une balance. Tous les habitans de l’égypte étaient dans la balance, et dans l’autre il n’y avait qu’un enfant dont le poids égalait celui de tous les habitans de l’égypte. Le roi appella tous ses mages. L’un d’eux lui dit, que sans doute cet enfant était un hébreu qui serait fatal à son royaume. Il y avait alors en égypte un lévite nommé Amran, qui avait épousé sa sœur utérine appellée Jocabed. Il en eut d’abord une fille nommée Marie ; ensuite Jocabed lui donna Aaron, ainsi appellé parce que le roi avait ordonné de noyer tous les enfans hébreux. Trois ans après il eut un fils très beau, qu’il cacha dans sa maison pendant trois mois. L’auteur raconte ensuite l’avanture de la princesse qui adopta l’enfant et qui l’appella Mosé , sauvé des eaux, mais son pere l’appella Chabar , sa mere l’appella Jécothiel , sa tante Jared . Aaron le nomma Abizanah , et ensuite les israëlites lui donnerent le nom de Nathanaël . Mosé n’avait que trois ans lorsque le roi se maria et qu’il donna un grand festin ; sa femme était à sa droite, et sa fille était avec le petit Mosé à sa gauche ; cet enfant en se jouant prit la couronne du roi, et se la mit sur la tête. Le mage Balaam eunuque du roi lui dit, seigneur, souviens-toi de ton rêve ; certainement l’esprit de Dieu est dans cet enfant. Si tu ne veux que l’égypte soit détruite, il faut le faire mourir. Cet avis plut beaucoup au roi. On était prêt de tuer le petit Mosé, lorsque Dieu envoya l’ange Gabriel, qui prit la figure d’un des princes de la cour de pharaon, et dit au roi, je ne crois pas qu’on doive faire mourir un enfant qui n’a pas encore de jugement, mais il faut l’éprouver : présentons-lui à choisir d’une perle ou d’un charbon ardent. S’il choisit le charbon, ce sera une preuve qu’il est sans raison, et qu’il n’a pas eu mauvaise intention en prenant la couronne royale ; mais s’il prend la perle, ce sera une preuve qu’il a du jugement ; et alors on pourra le tuer. Aussi-tôt on met devant Mosé un charbon ardent, et une perle ; Mosé allait prendre la perle ; mais l’ange lui arrêta la main subtilement, et lui fit prendre le charbon qu’il porta lui-même à sa langue. L’enfant se brûla la langue et la main ; et c’est ce qui le rendit begue pour le reste de sa vie. L’historien Flavius Joseph avait lu sans doute l’auteur juif que nous citons ; car il dit dans son livre second, chapitre cinq, qu’un des mages égyptiens, un des grands prophêtes du pharaon, lui dit qu’il y avait un enfant parmi les hébreux, dont la vertu serait un prodige, qu’il réleverait sa nation et qu’il humilierait l’égypte entiere. Ensuite Flavien Joseph raconte comment le petit Mosé à l’âge de trois ans prit le diademe du roi et marcha dessus, et comment un prophête du pharaon conseilla au roi de le faire mourir. Toutes ces différentes leçons ont fait dire aux savants, qu’il en a été de l’histoire sacrée de Moyse, comme de l’histoire profane d’Hercule à quelques égards, et que chaque auteur qui en a parlé y a mis beaucoup du sien, en ajoutant à la sainte écriture des aventures dont elle ne parle pas. (note de Voltaire.)

  1. l’auteur hébreu cité ci-dessus dit au contraire, que Mosé alla en éthiopie, étant alors âgé de treize ans, mais grand, bien fait, et vigoureux. Qu’il combattit pour le roi d’éthiopie contre les arabes, et qu’après la mort du roi d’éthiopie Nécano, la veuve de ce monarque épousa Mosé, qui fut élu roi. Ce jeune homme