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SUR L'ESPRIT DES LOIS. 429

��XXXI.

��« Lorsque Louis XIII voulut être juge dans le procès du duc de La Valette..., le président de Bellièvre dit qu'il voyait, dans cette afTaire, une chose étrange, un prince opiner au procès d'un de ses sujets, etc. »

L'auteur ajoute qu'alors le roi serait juge et partie ; qu'il per- drait le plus bel attribut de la souveraineté, celui de faire grâce, etc. (Pages 88 et 89, liv. VI, chap. v.)

Voilà jusqu'ici le seul endroit où l'auteur parle de nos lois dans son Esijrit des Lois; et malheureusement, quoiqu'il eût été président à Bordeaux, il se trompe. C'était originairement un droit de la pairie qu'un pair accusé criminellement fût jugé par le roi, son principal pair. François II avait opiné dans le procès contre le prince de Condé, oncle de Henri IV. Charles VII avait donné sa voix dans le procès du duc d'Alençon, et le parlement même l'avait assuré que c'était son devoir d'être à la tête des juges. Aujourd'hui la présence du roi au jugement d'un pair, pour le condamner, paraîtrait un acte de tyrannie. Ainsi tout change. Quant au droit de faire grâce, dont l'auteur dit que le prince se priverait s'il était juge, il est clair que rien ne l'empê- cherait de condamner et de pardonner.

Je suis obligé de m'abstenir de plusieurs autres questions, sur lesquelles j'aurais des éclaircissements à demander. Il faut être court, et il y a trop de livres. Mais je m'arrête un instant sur l'anecdote suivante,

XXXII.

(( Soixante-dix personnes conspirèrent contre l'empereur Basile. Il les fit fustiger ; on leur brûla les cheveux et le poil. Un cerf l'ayant pris par sa ceinture, quelqu'un de sa suite tira son épée, coupa la ceinture, et le délivra. Il lui fit trancher la tête... Qui pourrait penser que, sous le même prince, on eût rendu ces deux jugements? » (Page 102, liv. VI, chap. xvi.)

L'Esprit des Lois est plein de ces contes, qui n'ont assurément aucun rapport aux lois. Il est vrai que dans la misérable Histoire hizanline, monument de la décadence de l'esprit humain, de la superstition la plus sotte, et des crimes de toute espèce, on trouve ce récit, tome III, page 576, traduction de Cousin.

C'est au président Cousin et au président Montesquieu à cher- cher la raison pour laquelle l'extravagant tyran Basile n'osa pas punir de mort les complices d'une conjuration contre lui, et la

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