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402 ARTICLES EXTRAITS

Nous ne retracerons point ici Thistoire des afflictions qui tourmentaient alors les deux branches de la maison de France et d'Espagne ; la longue et funeste maladie de Philippe V, qui affaiblit les organes de sa tête; son mariage avec une héritière^ du duché de Parme, qui commença son règne par chasser la princesse des Ursins, accourue au-devant d'elle pour la servir; les jalousies qui aigrirent le conseil du roi d'Espagne contre le régent de France; les diverses factions qui partagèrent la France, factions qui consistaient plutôt en parties de plaisirs et en dis- cours qu'en projets politiques, et qui formaient un étrange con- traste avec la misère de l'État. >'ous ne dirons point comment la duchesse de Berry, fille du régent, fut près d'épouser un gentil- homme d'une ancienne maison de Périgord, nommé le comte de Riom, à l'exemple de Mademoiselle, cousine germaine de Louis XIV, qui épousa en effet le comte de Lauzun, et à l'exemple de tant d'autres mariages dans les siècles passés. Xous ne répé- terons point les calomnies horribles et absurdes répandues alors par toutes les bouches et dans tous les libelles. Le rédacteur cir- conspect laisse à peine entrevoir ces infamies. Le gouvernement du royaume était d'autant plus difficile qu'il y avait plus de con- seils. La principale difficulté venait des énormes dettes de l'État, et de la disette absolue d'argent.

On sait assez que dans ces disettes qui ont si souvent effrayé la France, l'argent n'a point péri : une partie a passé dans les pays voisins; une autre a été cachée dans les coffres des traitants, enrichis du malheur général. En 1625, avant que le cardinal de Richelieu eût affermi son pouvoir, on avait ordonné qu'une chambre de justice serait établie tous les dix ans pour reprendre des mains des traitants les deniers qu'ils avaient gagnés avec le roi. Cette méthode, depuis la chambre de justice de 1625, n'avait été pratiquée qu'au temps de la chute de Fouquet. Le duc de Noailles la crut nécessaire. On peut voir dans le livre instructif de M. de Forbonnais-, et dans les écrits de ce temps-là, mêlés de vrai et de faux, qu'on condamna ceux qui avaient traité avec le roi à lui donner environ deux cent vingt millions, appartenants réellement au peuple, sur qui on les avait levés. De ces deux cent vingt millions, il n'entra que très-peu de chose dans ce qu'on appelle les coffres du roi, La facilité du régent répandit presque tout entre des courtisans et des femmes. Il y eut quelques gens

��1. Elisabeth Farnèse, mariée en 1714 à Philippe V, morte en 176G.

2. Celui qui est déjà cité tome XXVIII. page 333.

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