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est-ce qu’il n’y a pas un dieu en Israël ? Pourquoi consultez-vous un dieu en Acaron ; c’est pourquoi, voici ce que dit Adonaï : ô roi ! Tu ne releveras point de ton lit, ô roi ! Mais tu mourras de mort. Et ayant parlé ainsi, élie s’en alla. Les gens du roi retournerent donc vers lui, et lui dirent : il est venu un homme, qui nous a dit tu ne releveras point de ton lit, ô roi ! Mais tu mourras de mort[1] ;… cet homme est très-poiloux, et il a une ceinture de cuir sur les reins. Ah ! C’est élie le thesbite, dit le roi. Et aussi-tôt il envoya un capitaine avec cinquante soldats pour prendre élie, qui était sur le haut d’une montagne. Le capitaine dit à élie : homme de Dieu, le roi t’ordonne de descendre de ta montagne. élie lui répondit ; si je suis homme de Dieu, que la foudre descende du ciel et te dévore toi et tes cinquante hommes. Et la foudre descendit du ciel et dévora les cinquante hommes et le capitaine. Le roi Ochosias envoya aussi-tôt un autre capitaine avec cinquante autres soldats. Le capitaine dit à élie : allons, allons, homme de Dieu, descends vite. élie lui répondit : si je suis homme de Dieu, que la foudre descende du ciel et te dévore toi et tes cinquante. Et la foudre descendit et dévora encore ce capitaine et cette cinquantaine[2].

  1. nous n’examinerons ici que les objections de Mylord Bolingbroke. Selon lui " élie le thesbite est un personnage imaginaire ; et Thesbe sa patrie est aussi inconnue que lui. Ces premieres paroles confirment que chaque bourgade, dans tous ces pays-là, avait son dieu qui en valait bien un autre. Il était indifférent au roi Ochosias, d’envoyer chez le dieu Adonaï, ou chez le dieu Belzébub. Il paraît qu’élie était très connu du roi Ochosias ; puisque, lorsque ses gens lui dirent qu’il est venu un fou poiloux avec une ceinture de cuir, il dit tout d’un coup : c’est élie. Il ne crut pas devoir consulter un homme que toute sa cour regardait avec dérision. "
  2. Mylord Bolingbroke continue ainsi. " cet élie, qui fait descendre deux fois la foudre sur deux capitaines, et sur deux compagnies de soldats envoyées de la part de son roi, ne peut être qu’un personnage chimérique ; car s’il pouvait se battre ainsi à coups de foudre, il aurait infailliblement conquis toute la terre en se promenant seulement avec son valet. C’est ce qu’on disait tous les jours aux sorciers : si vous êtes sûrs que le diable, avec qui vous avez fait un pacte, fera tout ce que vous lui ordonnerez, que ne lui ordonnez-vous de vous donner tous les empires du monde, tout l’argent et toutes les femmes ? On pouvait dire de-même à élie : tu viens de tuer deux capitaines et deux compagnies à coups de tonnerre ; et tu t’enfuis comme un lâche, et comme un sot, dès que la reine Jésabel te menace de te faire pendre ! Ne pouvais-tu pas foudroyer Jésabel, comme tu as foudroyé ces deux pauvres capitaines ? Quelle impertinente contradiction fait de toi tantôt un dieu, et tantôt un gougeat ? Quel homme sensé peut supporter ces détestables contes, qui font rire de pitié et frémir d’horreur ? " ces invectives terribles seraient à leur place contre les prêtres des faux dieux ; mais non pas contre un prophete du seigneur, qui ne parle et n’agit jamais de