RUTH
Dans les jours d’un juge, quand les juges
présidaient, il y eut famine sur la terre. Et
un homme de Bethléem de Juda voyagea chez
les moabites avec sa femme et ses deux enfans.
Il s’appellait Hélimélec, et sa femme Noëmi...
étant donc venus au pays des moabites, ils y
demeurerent...
Hélimélec, mari de Noëmi, resta avec
ses deux fils... ils prirent pour femmes des filles
de Moab, dont l’une s’appellait Orpha et l’autre
Ruth.
Après la mort des deux fils de Noëmi, elle
demeura seule ayant perdu son mari et ses deux
fils... elle se mit en chemin avec ses deux brus
pour revenir du pays des moabites dans sa
patrie...[1].
... Orpha s’en retourna, mais Ruth resta
avec sa belle-mere.
... Noëmi dit à Ruth : voilà votre sœur qui
s’en est retournée à son peuple et à ses dieux ;
allez-vous-en avec elle.
Ruth lui répondit : j’irai avec vous ; et
partout où vous resterez je resterai ; votre peuple
sera mon peuple, votre dieu sera mon dieu ;
je mourrai dans la terre où vous mourrez...
étant donc parties ensemble elles arriverent à
Bethléem...
c’est ainsi que Noëmi étant revenue avec
Ruth la moabite sa bru, retourna à Bethléem
quand on moissonnait les orges...
or il y avait un parent d’Hélimélec nommé
- ↑ comme il s’agit dans le livre de Ruth du bisayeul de David, on peut conjecturer aisément le temps où vivait Booz mari de Ruth. Il faut compter quatre générations de lui à David : cela forme environ cent vingt ans ; et la chose doit être arrivée dans le commencement de la grande servitude de quarante ans. Cette histoire est bien différente des précédentes : elle n’a rien de toutes les cruautés que nous avons vues ; elle est écrite avec une simplicité naïve et touchante. Nous ne connaissons rien ni dans Homere, ni dans Hésiode, ni dans Hérodote, qui aille au cœur comme cette réponse de Ruth à sa mere : j’irai avec vous ; et par-tout où vous resterez je resterai ; votre peuple sera mon peuple, votre dieu sera mon dieu ; je mourrai dans la terre où vous mourrez . Il y a du sublime dans cette simplicité. Les critiques ont beau dire que cet empressement de quitter le dieu de son pere pour le dieu de sa belle-mere marque une indifférence de religion condamnable. Ils ont beau inférer delà que la religion juive, exclusive de toutes les autres, n’était pas encore conformée ; que chaque canton d’Arabie et de Syrie avait son dieu ou son étoile ; qu’il était égal d’adorer le dieu de Moab, ou le dieu de Gaza, ou le dieu de Sidon, ou le dieu des juifs. Quand même on eût pensé ainsi dans ces temps d’anarchie, cela n’empêcherait pas que le discours de Ruth à Noëmi ne méritât les eloges de tous ceux qui ont un cœur sensible.