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. Quand vous serez entrés dans la terre que le seigneur vous donnera, et que vous la posséderez, et que vous direz, nous voulons choisir un roi comme en ont les autres nations qui nous environnent ; vous ne pourrez prendre pour roi qu’un homme de votre nation, un de vos freres. Et quand il sera établi roi, il n’aura pas un grand nombre de chevaux, il ne ramenera point le peuple en égypte, il n’aura point cette multitude de femmes qui enchantent son esprit, ni de grands monceaux d’or et d’argent. [1]

… après qu’il sera assis sur son trône, il écrira pour lui ce deutéronome sur un exemplaire des prêtres de la tribu de Lévi. Lorsque vous combattrez vos ennemis, si Dieu les livre entre vos mains, et si vous voyez parmi vos captifs une belle femme pour laquelle vous aurez de l’amour, et si vous voulez l’épouser ; vou

    massacrer tous les habitans d’une ville qui vous appartient, et d’y détruire tout jusqu’aux bêtes, parce que quelques citoyens de cette ville ont eu un culte différent du vôtre. Ce serait un peuple coupable de cette exécrable cruauté qu’il faudroit détruire, comme nous avons détruit les loups en Angleterre. " pour tâcher d’appaiser ceux qui pensent comme le président de Harley et comme le Lord Bolingbroke, nous dirons que ces passages du deutéronome ne sont probablement que comminatoires ; et nous dirons à ceux qui sont persuadés qu’Esdras ou quelque autre lévite composa ce livre, qu’il ne voulut qu’inspirer une forte horreur pour le culte des babyloniens, et pour celui des persans. Mais nous conviendrons qu’il ne faut jamais lire l’écriture qu’avec un esprit de paix et de charité universelle. Nous avouons d’ailleurs, que cela n’a pu être écrit que dans un temps où les hébreux eurent des villes, et où chaque ville voulut avoir son dieu et son culte, pour être plus indépendante de ses voisines. La haine fut extrême entre tous les habitans de cette partie de la Syrie. La superstition et l’esprit de rapine envenimerent cette haine ; et tant qu’il y eut des juifs, leur histoire fut l’histoire des cannibales. Mais c’est que Dieu voulait les éprouver. D’ailleurs la loi juive ne nous importe point. Nous sommes chrétiens, et non pas juifs.

  1. ceux qui croient qu’un lévite, du temps des rois, est l’auteur du deutéronome, sont confirmés dans leur opinion par cet article. Il y a, selon la vulgate, trois cents cinquante-six ans de la mort de Mosé à l’élection du roi Saül, et bien davantage selon d’autres calculs. Comment se pourrait-il que Mosé parlât des rois, lorsque Dieu était le seul roi des juifs ? On a soupçonné que le pentateuque entier fut écrit par quelques lévites huit cents vingt-sept ans après Mosé selon la vulgate, du temps du roi Josias. Ce livre, alors ignoré, fut trouvé au fond d’un coffre par le grand-prêtre Helkia lorsqu’il comptait de l’argent. Ce fut vers ce temps-là que quelques juifs se réfugierent en égypte sous le roi Néchao ; ainsi le lévite, auteur du pentateuque, avertit ici les rois de ne point laisser passer leurs sujets chez les égyptiens. Tout semblerait concourir à rendre cette opinion vraisemblable, si d’ailleurs on n’était pas convaincu que Mosé seul est l’auteur du pentateuque. La défense d’avoir un grand nombre de femmes et de chevaux, semble regarder principalement Salomon, qu’on accuse d’avoir eu sept cents femmes, et trois cents concubines, et quarante mille écuries ; car pour Saül, il ne fut choisi pour roi que dans le temps qu’il cherchait ses ânesses.