Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome3.djvu/406

Cette page n’a pas encore été corrigée


ACTE DEUXIÈME



SCÈNE1


Zamore, américains.



Zamore.

Amis de qui l’audace, aux mortels peu commune,
Renaît dans les dangers et croît dans l’infortune ;
Illustres compagnons de mon funeste sort,
N’obtiendrons-nous jamais la vengeance ou la mort ?
Vivrons-nous sans servir Alzire et la patrie,
Sans ôter à Gusman sa détestable vie,
Sans punir, sans trouver cet insolent vainqueur,
Sans venger mon pays qu’a perdu sa fureur ?
Dieux impuissants ! Dieux vains de nos vastes contrées !
À des dieux ennemis vous les avez livrées :
Et six cens espagnols ont détruit sous leurs coups
Mon pays et mon trône et vos temples et vous.
Vous n’avez plus d’autels et je n’ai plus d’empire,
Nous avons tout perdu, je suis privé d’Alzire :
J’ai porté mon courroux, ma honte et mes regrets
Dans les sables mouvants, dans le fond des forêts ;
De la zone brûlante et du milieu du monde
L’astre du jour a vu ma course vagabonde
Jusqu’aux lieux où cessant d’éclairer nos climats
Il ramène l’année et revient sur ses pas.
Enfin votre amitié, vos soins, votre vaillance
À mes vastes désirs ont rendu l’espérance ;
Et j’ai cru satisfaire, en cet affreux séjour,
Deux vertus de mon cœur, la vengeance et l’amour.