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voir ; comment vous portez-vous ? vous venez pour m’épouser, vous me comblez de joie, Mme Michelle.) N’en ai-je pas trop dit, madame Michelle ?

LE CHEVALIER.

Mademoiselle, je faisais mon plus cher désir de l’accueil gracieux dont vous m’honorez ; mais je n’osais en faire mon espérance. Préféré par monsieur votre père, je ne me tiens point heureux si je ne le suis par vous ; c’est de vous seule que je voulais vous obtenir ; vos premiers regards font de moi un amant, et c’est un titre que je veux conserver toute ma vie.

GOTTON.

Oh ! comme il parle ! comme il parle ! et que ce langage est différent de celui de nos gentilshommes de campagne ! Ah ! les sots dadais, en comparaison des seigneurs de la cour ! Mon amant, irons-nous bientôt à la cour ?

LE CHEVALIER.

Dès que vous le souhaiterez, mademoiselle.

GOTTON.

N’y a-t-il pas une reine, là ?

LE CHEVALIER.

Oui.

GOTTON.

Et qui me recevra parfaitement bien ?

LE CHEVALIER.

Avec beaucoup de bonté, assurément.

GOTTON.

Cela fera crever toutes les femmes de dépit ; j’en serai charmée.

LE CHEVALIER.

si vous souhaitez d’aller au plus tôt briller à la cour, mademoiselle, daignez donc hâter le moment de mon bonheur. Monsieur votre père veut retarder notre mariage de quelques jours ; je vous assure que ce retardement me mettrait au désespoir. Je sais que vous avez des amants jaloux de mon bonheur, qui songent à vous enlever, et qui voudraient vous renfermer à la campagne pendant toute votre vie.

GOTTON.

Ah ! les coquins ! pour m’enlever, passe ; mais m’enfermer !

LE CHEVALIER.

Le plus sûr moyen de leur dérober la possession de vos charmes, c’est de vous donner à moi par un prompt hymen qui vous mette en liberté, et moi au comble du bonheur : il faudrait m’épouser plus tôt que plus tard.