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qu’en entrant dans votre petit temple il n’y vit point votre coffre, et qu’il fut privé de l’honneur de le porter en triomphe à Rome.

Vous savez pourtant, monsieur et messieurs, que votre arche d’alliance, construite dans le désert, prise par les Philistins, rendue par deux vaches, placée dans Hershalaïm, y était encore après la captivité en Babylone ; l’auteur des Paralipomènes[1] le dit expressément. Fuit arca ibi usque ad præsentem diem.

Vos rabbins, je ne l’ignore pas, ont prétendu que cette arche est cachée dans le creux d’un rocher du mont Nebo, où est enterré Moïse, et qu’on ne la découvrira qu’à la fin du monde ; mais cela n’empêche pas qu’on ne la montre à Rome parmi les plus belles et les plus anciennes reliques qui décorent cette sainte ville. Les antiquaires, qui ont la vue d’une finesse extrême, et qui voient ce que les autres hommes ne voient point, remarquent dans l’arc de triomphe érigé à Titus la figure d’un coffre qui est sans doute votre arche. Elle nous appartient de droit : nous vous sommes substitués ; vos dépouilles sont nos conquêtes.

Cessez de vouloir, par vos subtilités rabbiniques, ébranler la foi d’un chrétien qui vous plaint, qui vous aime, mais qui, ayant l’honneur d’être l’olivier franc, ne souillera jamais cette gloire en vous accordant la moindre de vos prétentions.

Si vous voulez que je sois de votre avis, messieurs, vous n’avez qu’à vous faire baptiser, je m’offre à être votre parrain. À l’égard de monsieur votre secrétaire, vous pouvez le faire circoncire, je ne m’y opposerai point.

INCURSION SUR NONOTTE,
EX-JÉSUITE.

Messieurs les six juifs, monsieur leur secrétaire, plus vous avez été redoutables à mon ami intime, plus j’ai dû le défendre. Vous étiez déjà assez forts par vous-mêmes ; j’ai été surpris que vous ayez cherché des troupes auxiliaires chez les jésuites : est-ce parce qu’ils sont aujourd’hui dispersés comme vous, que vous les appelez à votre secours ? Vous combattez sous le bouclier du R. P. Nonotte ; vous renvoyez mon ami à ce savant homme ; vous le regardez comme un de vos grands capitaines, parce qu’il a servi de goujat, dites-vous, dans une armée levée contre l’Encyclopèdie. Permettez-moi donc, messieurs, de vous renvoyer à un des

  1. II, cap. V, vers 9.