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III. — Filles prises en guerre.

Mais vous étiez si bons que, quand par hasard il se trouvait dans le butin une paysanne fraîche et jolie, il vous était permis de coucher avec elle, et même de la joindre au nombre de vos épouses : cela devait faire un excellent ménage. Il est vrai que votre captive ne pouvait avoir les honneurs d’épousée qu’au bout d’un mois ; mais de braves soldats n’attendent pas si longtemps à jouir du droit de la guerre.

IV. — Filles égorgées.

Je ne sais qui a dit[1] que votre usage était de tuer tout, excepté les filles nubiles, « N’est-il pas clair, répondez-vous, que c’est calomnier grossièrement nos lois, ou montrer évidemment à toute la terre que vous ne les avez jamais lues ? »

Ah ! toute la terre, messieurs ! N"êtes-vous pas comme ce savant qui prenait toujours l’Université pour l’univers ? Sans doute celui qui vous a reproché d’épargner toujours les filles s’est bien trompé : témoin toutes les filles égorgées à Jéricho, au petit village de Haï traité comme Jéricho, aux trente et un villages dont vous pendîtes les trente et un rois, et qui furent livrés au même anathème. Oui, messieurs, il est clair qu’on vous a calomniés grossièrement. Tout ce que je puis vous dire, c’est qu’il est bien étrange qu’on parle encore dans le monde de vous, et qu’on perde son temps à vous calomnier ; mais vous nous le rendez bien.

V. — Mères qui détruisent leur fruit.

Laissons là votre code militaire : je suis pacifique ; suivons pied à pied votre police. Vous louez votre législation de n’avoir décerné aucune peine pour les mères qui détruisent leurs enfants. Vraiment puisqu’on ne les a pas punies pour les avoir tués et pour les avoir mangés, on ne les aura pas punies pour les avoir empoisonnés ou les avoir fait cuire. On vous a dit que les Juifs mangèrent quelquefois de petits enfants[2], mais on ne vous a pas dit qu’ils les aient mangés tout crus : un peu d’exactitude, s’il vous plaît.

  1. Voltaire lui-même ; voyez tome XIX, page 513; et XXV, 70.
  2. Voyez page 531.