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propositions ne sont pas dans Jansénius : car, en conscience, je ne crois pas qu’il y ait le moindre mal à penser que certains mots sont ou ne sont pas dans Jansénius ; mais je crois que le petit-fils de Moïse était un vaurien, et qu’on dégénère souvent dans les grandes maisons.

XXVI. — Des cinquante mille soixante et dix Juifs
morts de mort subite
.

Vous ne ferez jamais accroire que le nombre cinquante mille soixante et dix ne fasse pas 50,070. Je sais bien que le docteur irlandais Kennicott[1] dans son pamphlet dédié en 1768 au révérend évêque d’Oxford, dit qu’il n’a jamais pu digérer l’histoire des hémorrhoïdes du peuple philistin et des cinq anus d’or ; encore moins, dit-il, l’histoire de cinquante mille soixante et dix Bethsamites morts de mort subite pour avoir regardé l’arche. Il dit dans son pamphlet que « il avait autrefois, ainsi que Sa Grandeur l’évêque d’Oxford, un furieux penchant pour le texte hébreu ; mais que Sa Grandeur et lui en sont bien revenus ». Ce pamphlet irlandais est assez curieux. M. Kennicott se dit de l’Académie des inscriptions de Paris, quoiqu’il n’en soit pas ; il propose une souscription d’environ six cent mille livres sterling, qu’il dit à moitié remplie, à Paris, chez Saillant ; à Rome, chez Monaldini ; à Venise, chez Pasquali ; et à Amsterdam, chez Marc-Michel Rey. Ainsi, messieurs, s’il vous plaît de lire cet ouvrage, et si vous demeurez en effet auprès d’Utrecht, adressez-vous à Marc-Michel, vous aurez parfait contentement. Vous verrez le système complet de M. Kennicott sur la manière dont les Philistins furent affligés in secretiori parte natium[2], dans la plus secrète partie des fesses. Vous y verrez pourquoi les fesses des Philistins furent punies plutôt qu’une autre partie de leur corps pour avoir pris l’arche, et par quelle raison cinquante mille soixante et dix Israélites moururent d’apoplexie pour l’avoir regardée lorsque deux vaches vinrent la rendre de leur plein gré.

Vous avez sans doute étudié l’anatomie ; vous jugerez de l’opinion de M. Kennicott sur l’art que les orfévres philistins employèrent pour fabriquer des anneaux d’or qui ressemblassent parfaitement à la plus secrète partie des fesses. Cela sera presque

  1. Voyez tome XVII, page 568.
  2. Ier livre des Rois, chapitre v, verset 6.