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FRAGMENTS HISTORIQUES

ne sont que les échos des premiers brachmanes. Il a très-ingénieusement résolu le problème de la durée du monde, fixée par ces anciens philosophes de l’Inde à quatre millions trois cent vingt mille ans, dont il y a trois millions huit cent quatre-vingt-dix-sept mille huit cent quatre-vingt-un d’écoulés en l’an 1773 de notre ère. Ainsi notre monde n’aurait plus que quatre cent vingt-deux mille cent dix-neuf ans à subsister.

M. Le Gentil s’est très-bien aperçu que ce nombre, qui semble prodigieux, et qui n’est rien par rapport au temps nécessairement éternel, n’est qu’une combinaison des révolutions de l’équinoxe, à peu près comme la période julienne de Jules Scaliger, qui est une multiplication des cycles du soleil par ceux de la lune et par l’indiction.

Mais, en même temps, M. Le Gentil a reconnu avec admiration la science des brachmanes, et l’immensité des temps qu’il fallut à ces Indiens pour parvenir à des connaissances dont les Chinois même n’ont jamais eu l’idée, et qui ont été inconnues à l’Égypte et à la Chaldée, qui enseigna l’Égypte.

Ægyptum docuit Babylon, Ægyptus Achivos[1].


ARTICLE XXII.


DE LA RELIGION DES BRACHMANES, ET SURTOUT DE L’ADORATION D’UN SEUL DIEU.


Le gouvernement chinois accusé d’athéisme.


La théogonie des brachmanes s’enfonce dans des temps qui doivent encore plus étonner l’espèce humaine, dont la vie n’est qu’un instant.

M. Dow, M. Holwell, sont d’accord dans l’exposition de cette antique théogonie[2]. Tous deux savaient la langue sacrée du Hanscrit ou Sanscrit ; tous deux avaient demeuré longtemps dans le Bengale, où la première école des brachmanes subsiste encore.

  1. Ce vers-proverbe est cité avec quelque différence dans la Philosophie de l’Histoire ; voyez tome XI, page 33.
  2. On en trouvera quelque chose dans l’Essai sur les Mœurs et l’Esprit des nations ; mais c’est surtout chez MM. Holwell et Dow qu’il faut s’instruire. Consultez aussi les judicieuses réflexions de M. Sinner, dans son Essai sur les Dogmes de la métempsycose et du purgatoire. (Note de Voltaire.) — Voyez tome XI, page 183.