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DISCOURS

inventées. Écoutez ce même Moïse, et les autres prophètes qui le suivirent[1] : « Vous craindrez le Seigneur votre Dieu, et vous ne servirez que lui. » Comment est-il possible que Jésus ait dit à ses disciples[2] ; « Allez enseigner les nations, et les baptisez au nom du Père, du Fils, et du Saint-Esprit » ? Il ordonnait donc que les nations devaient l’adorer avec le Dieu unique ? Et vous soutenez cette erreur, puisque vous dites que « le Fils est Dieu ainsi que le Père ».

Pour trouver encore plus de contrariété entre vos sentiments et ceux des Hébreux, auprès desquels, après avoir quitté la croyance de vos pères, vous vous êtes réfugiés, écoutez ce que dit Moïse des expiations[3] : « Il prendra deux boucs en offrande pour les péchés, et un bélier pour l’holocauste ; et Aaron offrira son veau en offrande pour les péchés, et il priera pour lui et pour sa maison, et il prendra les deux boucs et les présentera devant le Seigneur à l’entrée du tabernacle d’assignation. Et puis Aaron jettera le sort sur les deux boucs, un sort pour le Seigneur, et un sort pour le bouc, qui doit être chargé des iniquités, afin qu’il soit renvoyé dans le désert. Il égorgera aussi l’autre bouc, celui du peuple, qui est l’offrande pour le péché, et il portera son sang au dedans du voile, et il en arrosera la base de l’autel, et il fera expiation pour le sanctuaire des souillures des enfants d’Israël et de leurs fautes selon tous leurs péchés. » Il est évident, par ce que nous venons de rapporter, que Moïse a établi l’usage des sacrifices, et qu’il n’a pas pensé ainsi que vous, Galiléens, qui les regardez comme immondes. Écoutez le même Moïse[4] : « Quiconque mangera de la chair du sacrifice de prospérité, laquelle appartient au Seigneur, et qui aura sur lui quelque souillure, sera retranché d’entre son peuple. »

L’on voit combien Moïse fut attentif et religieux dans tout ce qui regardait les sacrifices.

Il est temps actuellement de venir à la raison qui nous a fait parcourir toutes les opinions que nous venons d’examiner. Nous avons eu le dessein de prouver qu’après nous avoir abandonnés, pour passer chez les Juifs, vous n’avez point embrassé leur religion, et n’avez pas adopté leurs sentiments les plus essentiels. Peut-être quelque Galiléen mal instruit répondra : Les Juifs ne sacrifient point. Je lui répliquerai qu’il parle sans connaissance : premièrement, parce que les Galiléens n’observent aucun des

  1. Deut., chap vi. (Note de Voltaire.)
  2. Matth., xxviii. (Id.)
  3. Lévit., xvi. (Note de Voltaire.)
  4. Ibid., v. 15-16. (Id.)