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442 LETTRES DE MEMMIUS

Tolumc, puisque vous le permettez; mais ne le montrez qu'à des hommes qui vous ressemblent : à des hommes sans impiété et sans superstition, dégagés des préjugés de l'école et de ceux du monde, qui aiment la vérité et non la dispute; qui ne sont cer- tains que de ce qui est démontré, et qui se défient encore de ce qui est le plus vraisemblable.

{Ici suit le Traité de Memmius.)

��I. — Qu'il n'y a qu'un Dieu, contre Èpicure, Lucrèce, et autres philosophes.

Je ne dois admettre que ce qui m'est prouvé ; et il m'est prouvé qu'il y a dans la nature une puissance intelligente ^

Cette puissance intelligente est-elle séparée du grand tout? Y est-elle unie ? Y est-elle identifiée ? En est-elle le principe ? Y a-t-il plusieurs puissances intelligentes pareilles?

J'ai été efïrayé de ces questions que je me suis faites à moi- même. C'est un poids immense que je ne puis porter; pourrai-je au moins le soulever?

Les arbres, les plantes, tout ce qui jouit de la vie, et surtout l'homme, la terre, la mer, le soleil, et tous les astres, m'ayant appris qu'il est une intelligence active, c'est-à-dire un Dieu, je leur ai demandé à tous ce que c'est que Dieu, où il habite, s'il a des associés? J'ai contemplé le divin ouvrage, et je n'ai point vu Fouvrier ; j'ai interrogé la nature, elle est demeurée muette.

Mais, sans me dire son secret, elle s'est montrée, et c'est comme si elle m'avait parlé ; je crois l'entendre. Elle me dit : Mon soleil fait éclore et mûrir mes fruits sur ce petit globe, qu'il éclaire et qu'il échauffe ainsi que les autres globes. L'astre de la nuit donne sa lumière réfléchie à la terre, qui lui envoie la sienne ; tout est lié, tout est assujetti à des lois qui jamais ne se démentent : donc tout a été combiné par une seule intelli- gence.

Ceux qui en supposeraient plusieurs doivent absolument les supposer ou contraires, ou d'accord ensemble ; ou différentes, ou semblables. Si elles sont différentes et contraires, elles n'ont pu faire rien d'uniforme ; si elles sont semblables, c'est comme s'il n'y en avait qu'une. Tous les philosophes conviennent qu'il ne

]. Il l'a prouvé dans sa troisième lettre. {Note de Voltaire.)

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