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EN SON CONSEIL. 357

TITRES QUI DEMONTRENT l' L S CR P A TION TYRANNIQUE DES MOINES BÉNÉDICTINS, AUJOURD'HUI CHANOINES DE S A IN T- CL A l D E.

Nous sommes deux portions de peuple divisées en six commu- nautés ^ L'une de ces portions s'étend au milieu des montagnes et des précipices, de la source de la rivière d'Orbe jusqu'au Ijail- liagc de Pontarlier. Vous vous emparâtes de ce terrain afTreux, qui pourtant a été dompté et cultivé par nos travaux assidus. Vous le vendîtes, en 1266, à Jean de Chàlons, dit VAntique , l'un des seigneurs francs-comtois dont descendent les princes d'O- range. Or dans les actes de vente, où vous spécifiez tous les droits que vous vendez, il n'est pas question de mainmorte, d'esclavage, de servitude. Vous ne vendez que le terrain. De quel droit le possédiez-vous ? Nous l'ignorons. Et de quel droit vous en êtes- vous emparés, après l'avoir vendu par un contrat solennel? C'est ce que nous ignorons encore. Mais ce que nous savons très-bien, c'est que vous nous avez ravi ce que nous avions depuis acheté de vous-mêmes.

Jean de Cbàlons-Arlai, premier du nom, fils de Jean Chàlons l'Antique, fit bâtir un château auprès de la lioche de Alpe, dans le terrain vendu par vous, et qui ne vous appartenait point. Tout ce qui n'était pas seigneur châtelain était serf alors : c'était la jurisprudence des Huns, des Goths, des Vandales, des Hérules, des Gépides, des Francs, des Bourguignons, et de tous les bar- bares affamés qui étaient venus fondre chez les Gaulois et chez les anciens Celtes. Ces conquérants n'avaient jamais pénétré dans le pays, impraticable déjà, dit Saint-Claude, situé entre trois chaînes de montagnes couvertes de glaces éternelles, et où les huttes sont enterrées sous trente pieds de neige pendant sept mois de l'année. Les barbares venus du Borysthène et du Tanaïs négligèrent de régner sur le peu d'hommes sauvages qui habi- taient ces déserts, plus affreux cent fois que ceux de la Sibérie. Les fertiles plaines d'alentour avaient fixé leur convoitise. Mais Jean de Chàlons-Arlai premier, voyant ce pays peuplé, à force de soin et d'industrie, par les plus malheureux de tous les hommes, voulut réduire en servitude ces malheureux mêmes en vertu du droit féodal : car ce Jean de Chàlons s'imaginait, comme

1 Lons-Chaumois et Orcière, la Mouille et Morez, les Rousses, le Bois d'A- mont, Morbier, et Belle-Fontaine. {Note de Voltaire.)

— Voltaire a écrit Longchaumois dans la Nouvelle Requête qu'on uouvera ci-après, page 369.

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