Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome26.djvu/361

Cette page n’a pas encore été corrigée

DU NOUVEAU TESTAMENT. 351

l'aura pas employé en bonnes œuvres; il aura plus de doutes que de piété. Mes frères, celui qui partage son pain avec le pauvre vaut mieux que celui qui a comparé le texte hébreu avec le grec, et l'un et l'autre avec le samaritain.

Ce qui ne regarde que l'histoire fait naître mille disputes ; ce qui concerne nos devoirs n'en souffre aucune. Vous ne com- prendrez jamais comment le diable emporta Dieu dans le désert; comment il le tenta pendant quarante jours; comment il le trans- porta au haut d'une colline d'où l'on découvrait tous les royaumes de la terre. Le diable qui offre à Dieu tous ces royaumes, pourvu que Dieu Tadore, pourra révolter votre esprit; vous chercherez quel mystère est caché sous ces paroles et sous tant d'autres; votre entendement se fatiguera en vain : chaque parole vous plongera dans l'Incertitude et dans les angoisses d'une curiosité inquiète, qui ne peut se satisfaire. Mais si vous vous bornez à la morale, cet orage se dissipe, vous reposez dans le sein de la vertu.

J'ose me flatter, mes frères, que si les plus grands ennemis de la religion chrétienne nous entendaient dans ce temple écarté où l'amour de la vertu nous rassemble; si les lords Herbert, Shaftesbury, Bolingbroke; si les Tindal, les Toland, les Collins, les Whiston, les Trenchard, les Gordon, les Swift, étaient témoins de notre douce et innocente simplicité, ils auraient pour nous moins de mépris et d'horreur. Ils ne cessent de nous reprocher un fanatisme absurde. Nous ne sommes point fanatiques en étant de la religion de Jésus; il adorait un Dieu, et nous l'adorons; il méprisait de vaines cérémonies, et nous les méprisons. Aucun Évangile n'a dit que sa mère fût mère de Dieu ; aucun n'a dit qu'il fût consubstantiel à Dieu, ni qu'il eût deux natures et deux volontés dans une même personne, ni que le Saint-Esprit procé- dât du Père et du Fils. Vous ne trouverez dans aucun Évangile que les disciples de Jésus doivent s'arroger le titre de saint Père, de milord, de monseigneur; que douze mille pièces d'or doivent être le revenu d'un prêtre qui demeure à Lambeth, tandis que tant de cultivateurs utiles ont à peine de quoi ensemencer les trois ou quatre acres de terre qu'ils labourent, et qu'ils arrosent de pleurs. L'Évangile n'a point dit aux évêques de Rome : Forgez une dona- tion de Constantin pour vous emparer de la ville des Scipions et des Césars, pour oser être suzerains du royaume de Naples; évêques allemands, profitez d'un temps d'anarchie pour envahir la moitié de l'Allemagne. Jésus fut un pauvre qui prêcha des pauvres. Que dirions-nous des disciples de Penn et de Fox, enne- mis du faste, ennemis des honneurs, amoureux de la paix, s'ils

��I

�� �