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ÉCLAIRCISSEMENTS HISTORIQUES.

et Origène dit que les chrétiens n’admettent ni temples ni autels ; plusieurs premiers chrétiens se firent circoncire ; le plus grand nombre s’abstint de la chair de porc. La consubstantialité de Dieu et de son fils ne fut établie publiquement, et ce mot consubstantiel ne fut connu qu’au premier concile de Nicée. Marie ne fut déclarée mère de Dieu qu’au concile d’Éphèse, en 431, et Jésus ne fut reconnu clairement pour avoir deux natures qu’au concile de Chalcédoine, en 451 ; deux volontés ne furent constatées qu’à un concile de Constantinople, en 680. L’Église entière fut sans images pendant près de trois siècles ; on donna pendant six cents ans l’eucharistie aux petits enfants ; presque tous les Pères des premiers siècles attendirent le règne de mille ans. Ce fut très-longtemps une croyance générale que tous les enfants morts sans baptême étaient condamnés aux flammes éternelles ; saint Augustin le déclare expressément : parvulos non regeneratos ad æternam mortem ; livre de la Persévérance, chap, xiii. Aujourd’hui l’opinion des limbes a prévalu. L’Église romaine n’a reconnu la procession du Saint-Esprit par le Père et le Fils que depuis Charlemagne.

Tous les Pères, tous les conciles, crurent jusqu’au xiiie siècle que la vierge Marie fut conçue dans le péché originel ; et à présent cette opinion n’est permise qu’aux seuls dominicains.

Il n’y a pas la plus légère trace de l’invocation publique des saints avant l’an 375. Il est donc clair que la sagesse de l’Église a proportionné la croyance, les rites, les usages, aux temps et aux lieux. Il n’y a point de sage gouvernement qui ne se soit conduit de la sorte.

L’auteur de l’Essai sur les Mœurs, etc., a rapporté d’une manière impartiale les établissements introduits ou remis en vigueur par la prudence des pasteurs. Si ces pasteurs ont essuyé des schismes, si le sang a coulé pour des opinions, si le genre humain a été troublé, rendons grâces à Dieu de n’être pas nés dans ces temps horribles. Nous sommes assez heureux pour qu’il n’y ait aujourd’hui que des libelles.


XVIIIe SOTTISE DE NONOTTE.
sur jeanne d’arc[1].


Que cet homme charitable insulte encore aux cendres de Jean Hus et de Jérôme de Prague, cela est digne de lui ; qu’il veuille

  1. C’est dans le chapitre lxxx de l’Essai sur les Mœurs (voyez t. XII, p. 48), que Voltaire parle de Jeanne d’Arc. Dans la première édition des Éclaircissements, son paragraphe était très-court. Voltaire y fit des additions en 1769, 1770, 1776. Les additions faites en 1769 furent, en 1770, reproduites dans les Questions sur l’Encyclopédie : voyez tome XVII, page 351.