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SUR LE GOUVERNEMENT.

IX. (VII.)

Un citoyen d’Amsterdam est un homme ; un citoyen à quelques degrés de longitude par delà est un animal de service.

X. (VIII.)

Tous les hommes sont nés égaux ; mais un bourgeois de Maroc ne soupçonne pas que cette vérité existe.

XI.

Cette égalité n’est pas l’anéantissement de la subordination : nous sommes tous également hommes, mais non membres égaux de la société. Tous les droits naturels appartiennent également au sultan et au bostangi : l’un et l’autre doivent disposer avec le même pouvoir de leurs personnes, de leurs familles, de leurs biens. Les hommes sont donc égaux dans l’essentiel, quoiqu’ils jouent sur la scène des rôles différents.

XII. (IX.)

On demande toujours quel gouvernement est préférable. Si on fait cette question à un ministre ou à son commis, ils seront sans doute pour le pouvoir absolu ; si c’est à un baron, il voudra que le baronnage partage le pouvoir législatif. Les évêques en diront autant ; le citoyen voudra, comme de raison, être consulté, et le cultivateur ne voudra pas être oublié. Le meilleur gouvernement semble être celui où toutes les conditions sont également protégées par les lois.

XIII. (XI.)

Un républicain est toujours plus attaché à sa patrie qu’un sujet à la sienne, par la raison qu’on aime mieux son bien que celui de son maître.

XIV. (XII.)

Qu’est-ce que l’amour de la patrie ? Un composé d’amour-propre et de préjugés, dont le bien de la société fait la plus grande des vertus. Il importe que ce mot vague, le public, fasse une impression profonde.

XV. (XIII.)

Quand le seigneur d’un château ou l’habitant d’une ville accusent le pouvoir absolu, et plaignent le paysan accablé, ne les croyez pas. On ne plaint guère les maux qu’on ne sent point. Les citoyens, les gentilshommes, haïssent encore très-rarement la personne du souverain, à moins que ce ne soit dans les guerres civiles. Ce qu’on hait, c’est le pouvoir absolu dans la quatrième