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AVIS[1]

Je suis obligé de renouveler mes justes plaintes au sujet de toutes les éditions qu’on a faites jusqu’à présent de mes ouvrages dans les pays étrangers. Ce serait, à la vérité, un honneur pour la littérature de notre patrie que ces fréquentes éditions qu’on fait ailleurs des livres français, si elles étaient faites avec fidélité et avec soin. Mais elles sont d’ordinaire si défigurées, on y mêle si souvent ce qui n’est pas de nous avec ce qui nous appartient, on altère si barbarement le sens et le style, que cet honneur devient en quelque manière honteux et ridicule ; je ne suis pas assurément le seul qui s’en soit plaint, et qui ait prémuni le public contre ce brigandage ; mais je suis peut-être celui qui ai le plus de raisons de me plaindre. L’édition des Ledet d’Amsterdam, et celles d’Arkstée et Merkus, sont surtout pleines, à chaque page, de fautes et d’infidélités si grossières qu’elles doivent révolter tout lecteur ; on a même poussé l’abus de la presse jusqu’à insérer dans ces éditions des pièces scandaleuses, dignes de la plus vile canaille. Je me flatte que le public aura pour elles le même mépris que moi ; on sait assez à quel excès punissable plusieurs libraires de Hollande ont poussé leur licence. Ces livres aussi odieux que mal faits, qu’ils débitent et qu’ils regardent uniquement comme un objet de commerce, ne font tort à personne, si ce n’est aux lecteurs crédules qui achètent imprudemment ces malheureuses éditions sur leurs titres. J’ai cru qu’il était de mon devoir de renouveler cet avertissement.

Ce 20 janvier 1748.


  1. Cet Avis fut inséré dans le Mercure de janvier 1748. J’ai recueilli, et je donnerai dans le courant de l’édition, à leurs dates, divers Avis, Déclarations, et autres pièces de même nature. (B.)