Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome23.djvu/135

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
125
SOMMAIRES DES PIÈCES DE MOLIÈRE.

savantes. Le malheureux Cotin écrivait également contre Ménage, contre Molière, et contre Despréaux : les satires de Despréaux l’avaient déjà couvert de honte ; mais Molière l’accabla. Trissotin était appelé aux premières représentations Tricotin. L’acteur qui le représentait avait affecté, autant qu’il avait pu, de ressembler à l’original par la voix et par les gestes. Enfin, pour comble de ridicule, les vers de Trissotin, sacrifiés sur le théâtre à la risée publique, étaient de l’abbé Cotin même. S’ils avaient été bons, et si leur auteur avait valu quelque chose, la critique sanglante de Molière et celle de Despréaux ne lui eussent pas ôté sa réputation. Molière lui-même avait été joué aussi cruellement sur le théâtre de l’hôtel de Bourgogne, et n’en fut pas moins estimé : le vrai mérite résiste à la satire. Mais Cotin était bien loin de se pouvoir soutenir contre de telles attaques : on dit qu’il fut si accablé de ce dernier coup qu’il tomba dans une mélancolie qui le conduisit au tombeau[1]. Les satires de Despréaux coûtèrent aussi la vie à l’abbé Cassaigne[2], triste effet d’une liberté plus dangereuse qu’utile, et qui flatte plus la malignité humaine qu’elle n’inspire le bon goût.

La meilleure satire qu’on puisse faire des mauvais poëtes, c’est de donner d’excellents ouvrages ; Molière et Despréaux n’avaient pas besoin d’y ajouter des injures.


LA COMTESSE D’ESCARBAGNAS,
Petite comédie en un acte et en prose, représentée devant le roi, à Saint-Germain, en février 1672[3], et à Paris, sur le théâtre du Palais-Royal, le 8 juillet de la même année[4].

C’est une farce, mais toute de caractères, qui est une peinture naïve, peut-être en quelques endroits trop simple, des ridicules de la province : ridicules dont on s’est beaucoup corrigé à mesure que le goût de la société et la politesse aisée qui règne en France se sont répandus de proche en proche.


LE MALADE IMAGINAIRE,
En trois actes, avec des intermèdes, fut représenté sur le théâtre du Palais-Royal le 10 février 1673.

C’est une de ces farces de Molière dans laquelle on trouve beaucoup de scènes dignes de la haute comédie. La naïveté, peut-

  1. L’abbé Cotin mourut à 78 ans, en décembre 1081.
  2. Ce fait est également contesté.
  3. Le 2 décembre 1671.
  4. Le 8 juillet 1672.