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EFFETS DE L'ATTRACTION.

Examinons ici la plus simple des dissolutions, celle du sel dans l’eau.

Jetez dans le milieu d’un bassin plein d’eau un morceau de sel, l’eau qui est aux bords sera longtemps sans être salée ; elle ne peut le devenir que par le mouvement. Elle ne peut être en mouvement que par les forces centrales ; les parties d’eau les plus voisines de la masse du sel doivent graviter vers ce corps de sel ; plus elles gravitent, plus elles le divisent, et cela en raison composée du carré de leur vitesse et de leur masse ; les parties divisées par cet effort nécessaire sont mises en mouvement ; leur mouvement les porte dans toute l’étendue du bassin : cette explication est non-seulement simple, mais fondée sur toutes les lois de la nature.

[1]Concluons, en prenant ici la substance de tout ce que nous avons dit dans cet ouvrage :

1° Qu’il y a un pouvoir actif qui imprime à tous les corps une tendance les uns vers les autres ;

2° Que, par rapport aux globes célestes, ce pouvoir agit en raison renversée des carrés des distances au centre du mouvement, et en raison directe des masses ; et on appelle ce pouvoir l’attraction par rapport au centre, et gravitation par rapport aux corps qui gravitent vers ce centre ;

3° Que ce même pouvoir fait descendre ces mobiles sur notre terre, dans les progressions que nous avons vues ;

4° Qu’un pareil pouvoir est la cause de l’adhésion, de sa continuité et de la dureté, mais dans une proportion toute différente de celle dans laquelle les globes célestes s’attirent ;

5° Qu’un pareil pouvoir agit entre la lumière et les corps, comme nous l’avons vu, sans qu’on sache en quelle proportion[2].

À l’égard de la cause de ce pouvoir, si inutilement recherchée et par Newton et par tous ceux qui l’ont suivi, que peut-on faire de mieux que de traduire ici ce que Newton dit à la dernière page de ses Principes ?

Voici comme il s’explique en physicien aussi sublime qu’il est géomètre profond.

« J’ai jusqu’ici montré la force de la gravitation par les phé-

  1. Dans l’édition de 1756 et ses réimpressions, qui ne contiennent ni le commencement de ce chapitre, ni les deux qui le précèdent, on avait formé de ce qui suit un Chapitre XII, intitulé Conclusion. (B.)
  2. Toujours l’attraction ou la répulsion exercée sur les rayons lumineux quand ils se réfractent ou se réfléchissent. (D.) — Cet alinéa fut aussi supprimé en 1756. (B.)