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DES COMÈTES.

cette planète tombant presque en ligne parabolique vers le corps du soleil, garde à chaque instant la somme des forces acquises dans les instants précédents : ainsi cette force augmente tellement qu’elle en a autant pour remonter qu’elle en a eu pour descendre ; et elle repasse par les mêmes degrés de vitesse, comme un pendule qui fait ses vibrations.

Si on demande à présent quelle preuve on a que les comètes sont des corps opaques comme des planètes, et non des exhalaisons de feu, cette preuve est aussi aisée qu’indubitable.

1° La comète de l’année 1680 n’était pas, dans son périgée, éloignée du bord du soleil de la sixième partie du disque de cet astre. Il est aisé de calculer de combien cette comète devait être plus échauffée que la terre : donc il fallait que ce fût un corps très-solide pour que cet embrasement ne le détruisît pas.

2° La clarté des comètes augmente à nos yeux quand elles sont près du soleil, et diminue quand elles s’en éloignent : donc elles réfléchissent la lumière du soleil comme les autres planètes.

Voilà donc notre monde bien augmenté de ce qu’il était autrefois. Avant Galilée, on comptait sept planètes en y mettant très-mal à propos le soleil ; en voici seize aujourd’hui, dans lesquelles la terre se trouve, sans compter l’anneau de Saturne ; et il y a quelque apparence qu’on connaîtra un jour un certain nombre de ces autres planètes, qui, sous le nom de comètes, tournent comme nous autour du soleil ; mais il ne faut pas espérer qu’on les connaisse toutes.

Il est vrai qu’il faut des observations bien fines, et des mesures exactes jusqu’au plus grand scrupule, pour déterminer l’orbite de ces globes ; la moindre erreur peut faire une différence de plusieurs centaines d’années.

C’est peut-être une de ces petites erreurs qui trompa le célèbre mathématicien Jacques Bernouilli. Il assura que la comète de 1680 reparaîtrait au mois de mai 1719 ; il ne lui donnait qu’une période d’environ quarante années, ce n’était que dix ans de plus qu’à Saturne ; cependant son orbite était incomparablement plus excentrique au soleil que celle de Saturne. Newton trouve que l’orbite de cette comète est à celle que décrit Saturne, à peu près comme 16 est à 1, et qu’ainsi son cours devait être de plus de cinq cents années.

Pour s’assurer du cours et du retour des comètes, il faudrait premièrement une longue suite bien conservée d’observations exactes ; ensuite, si une comète fait en même temps le même chemin à la même distance, avec la même chevelure et la même