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DE LA PÉRIODE.

rapport à l’immense étendue des cieux ; mais c’est beaucoup par rapport au mouvement de notre pôle.

Imaginez donc ce petit globe de la terre faisant sa très-petite révolution d’environ cent quatre-vingt-dix-huit millions de lieues, qui n’est qu’un point dans l’espace immense rempli d’étoiles fixes (figure 61). Son pôle, qui répond à cette étoile polaire en P, au bout de soixante-douze ans sera éloigné d’un degré.

Dans six mille cinq cents ans ce pôle regardera l’étoile T, et au bout d’environ treize mille ans répondra à l’étoile qui est en Z ; successivement notre axe de Z ira en F et retournera en P, de façon qu’au bout de 25,920 ans, ou à peu près, nous aurons la même étoile polaire qu’aujourd’hui.

Après avoir exposé la figure de cette révolution de notre axe, il sera aisé d’en connaître la raison physique. Souvenons-nous qu’en parlant des inégalités du cours de la lune. Newton a démontré qu’elles dépendent toutes de l’attraction du soleil et de la terre combinées ensemble. C’est cette attraction, cette gravitation qui change continuellement la position de la lune, comme on l’a déjà vu au chapitre vi ; réciproquement l’attraction du soleil et celle de la lune, agissant sur la terre, changent continuellement la position de notre globe ; ne perdons pas de vue que la terre est beaucoup plus haute à l’équateur que vers les pôles. Imaginez la terre en T, la lune en L, le soleil en S (figure 62).

Si la terre et la lune tournaient toujours dans le plan de l’équateur, il est constant que cette élévation des terres D E serait toujours également attirée ; mais, quand la terre n’est pas dans les équinoxes, cette partie élevée E, par exemple, est attirée par le soleil et par la lune, que je suppose en cette situation : alors il arrive ce qui doit arriver à une boule qui, chargée inégalement, roulerait sur un plan ; elle vacillerait, elle inclinerait. Concevez cette partie D tombée vers E, par l’attraction du soleil, elle ne peut aller de D en E qu’en même temps le pôle terrestre P ne change de situation, et n’aille de P en Z ; mais ce pôle ne peut tomber de P en Z que l’équateur de la terre ne réponde à une autre partie du ciel qu’à celle à qui il répondait auparavant : ainsi les points de l’équinoxe et du solstice répondent successivement, au bout de soixante-douze ans, à un degré différent dans le ciel ; ainsi l’équinoxe arrivait autrefois, du temps d’Hipparque, quand le soleil paraissait être dans le premier point du bélier, c’est-à-dire quand la terre entrait réellement dans la balance, signe opposé au bélier ; et ce même équinoxe arrive de nos jours quand le soleil paraît être dans les poissons, c’est-à-dire quand la