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ET SUR SA PROPAGATION.

exemple que jamais rien se soit changé en feu, ni que le feu ait produit autre chose que du feu.

Il résulte donc que le feu est un être élémentaire dont les parties constituantes sont des éléments inaltérables : il ne se change en aucune autre substance, et aucune n’est changée en lui.

Il est donc à croire que l’air pur dégagé de tout le chaos de l’atmosphère, l’eau pure, la terre simple, ne se changeant eu aucun autre corps, sont les éléments primitifs de toute matière, au moins connue.

Les éléments que la chimie a découverts ne paraissent être autre chose que ces quatre éléments : car tout soufre, tout sel, toute huile, toute tête morte, contient toujours quelqu’un des quatre éléments, ou les quatre ensemble ; et à l’égard de ce qu’on a nommé l’esprit ou le mercure, ou ce n’est rien, ou c’est du feu.

Ainsi il semble qu’après toutes les recherches de la philosophie moderne on peut revenir à ces quatre éléments que l’antiquité avait admis sans les trop connaître, et ce ne serait pas la seule idée ancienne que les travaux du dernier siècle auraient justifiée en l’approfondissant.

Il paraît en effet qu’il est nécessaire que la matière, telle qu’elle est, soit composée d’éléments inaltérables : tout le mouvement imaginable n’en ferait jamais que la même substance mue différemment ; on ne voit pas comment un morceau de bois, par exemple, divisé et atténué, serait jamais autre chose que du bois en poussière.

Ne suit-il pas de tout ce qui a été dit que le feu est une substance inaltérable dans la constitution présente des choses ; qu’il

    répandue dans la liqueur, se précipite au fond du vase. Mais on a observé que le vase était attaqué par l’eau, qu’il avait perdu de son poids, et que cette terre était produite, du moins en très-grande partie, par la combinaison de l’eau avec la substance du vase. Si l’on plante une branche de saule dans de l’eau distillée, et qu’on l’arrose avec de l’eau aussi distillée, elle croit, et acquiert par conséquent plus de terre qu’elle n’en contenait d’abord. Mais cette quantité de terre est très-peu de chose ; et comme l’eau distillée contient elle-même un peu de terre qui s’enlève dans la distillation, comme il peut s’en trouver aussi dans l’air que la plante absorbe, on peut expliquer cette augmentation de terre dans la plante, sans être obligé de recourir à une véritable transformation de l’eau. On pourrait dire aussi que l’eau, dans la végétation, perdant quelques-uns de ces principes, ou se combinant avec ceux que l’air peut fournir, devient une substance infusible à un degré de chaleur plus grand que celui qu’elle avait.

    Les expériences, les observations, ne prouvent donc point que l’eau se transforme en terre : cependant, dans les détails des expériences, il se présente plusieurs circonstances qui paraissent favorables à cette opinion. (K.)