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3« l VARIANTES DE BRUTUS.

Entonds-tii tous cos cris ? voii^-tu tous ces honneurs Que ce peuple décerne à ses triomphateurs ? (^os aigles à Tarquin par Titus arrachées, Ces dépouilles des rois à ce temple attaciiées, Ces lambeaux précieux d’étendards tout sanglants, Ces couronnes, ces chars, ces festons, cet encens, Tout annonce en ces lieux sa gloire et mon outrage. Mon cœur, mon lâche cœur l’on chérit davantage. Par ces tristes combats, gagnés contre son roi. Je vois ce qu’il eût fait s’il combattait pour moi ; Sa valeur m’éblouit, cet éclat qui m’impose Me laisse voir sa gloire, et m’en cache la cause.

ALGI\E.

L’absence, la raison, ce trône où vous montez. Rendront un heureux calme à vos sens agités ; Vous vaincrez votre amour, et, quoi qu’il vous en coûte. Vous saurez…

TU L I, lE.

Oui, mon cœur le haïra sans doute. Ce fier républicain, tout plein de ses exploits. Voit d’un œil de courroux la fille de ses rois : Ce jour, tu t’en souviens, plein d’horreur et de gloire ; Ce jour que signala sa première victoire. Quand Brutus enchanté le reçut dans ces lieux, Du sang de mon parti tout couvert à mes yeux ; Incertaine, tremblante, et démentant ma bouche. J’interdis ma présence à ce Romain farouche. Quel penchant le cruel sentait à m’obéir ! Combien depuis ce temps il se plaît à me fuir ? Il me laisse à mon trouble, à ma fail^lesse extrême, A mes douleurs.

ALGINE.

On vient. Madame, c’est lui-même.

sci : \E II.

TITUS, TULLIE, ALGINE.

TITUS, au fond du théâtre. Voyons-la, n’écoutons que mon seul désespoir.

TULLIE.

Dieux ! je ne jiuis le fuir, et tremble de le voir.

T I T u s. Mon abord vous surprend, madame ; et ma présence Est à vos yeux en pleurs une nouvelle offense : Mon cœur s’était flatté devons obéir mieux ; Mais vous partez. Daignez recevoir les adieux D’un Romain qui pour vous eût prodigué sa vie ; Qui ne vous préféra que sa seule patrie ; Qui le ferait oncor, mais qui, dans ces combats Où l’amour du pays précipita ses pas. Ne chercha qu’à finir sa vie infortunée. Puisqu’il vous offenser les dieux l’ont condamnée.