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ACTE V, SCÈNE II.

Si vous y paraissez, votre mort est jurée.

Œdipe.

Eh ! Qui de mes états me défendrait l’entrée ?

Icare.

Du sceptre de Polybe un autre est l’héritier.

Œdipe.

Est-ce assez ? Et ce trait sera-t-il le dernier ?
Poursuis, destin, poursuis, tu ne pourras m’abattre.
Eh bien ! J’allais régner ; Icare, allons combattre :
À mes lâches sujets courons me présenter.
Parmi ces malheureux, prompts à se révolter,
Je puis trouver du moins un trépas honorable :
Mourant chez les Thébains, je mourrais en coupable ;
Je dois périr en roi. Quels sont mes ennemis ?
Parle, quel étranger sur mon trône est assis ?

Icare.

Le gendre de Polybe ; et Polybe lui-même
Sur son front en mourant a mis le diadème.
À son maître nouveau tout le peuple obéit.

Œdipe.

Eh quoi ! Mon père aussi, mon père me trahit ?
De la rebellion mon père est le complice ?
Il me chasse du trône !

Icare.

Il me chasse du trône !Il vous a fait justice ;
Vous n’étiez point son fils.

Œdipe.

Vous n’étiez point son fils.Icare !…

Icare.

Vous n’étiez point son fils. Icare !…Avec regret
Je révèle en tremblant ce terrible secret ;
Mais il le faut, seigneur ; et toute la province…

Œdipe.

Je ne suis point son fils !

Icare.

Je ne suis point son filsNon, seigneur ; et ce prince
A tout dit en mourant. De ses remords pressé,
Pour le sang de nos rois il vous a renoncé ;
Et moi, de son secret confident et complice,
Craignant du nouveau roi la sévère justice,
Je venais implorer votre appui dans ces lieux.