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AUGUSTE OCTAVE.

d’un souper ; il passa quelque temps avec elle dans un cabinet voisin, et la ramena ensuite à table, sans que lui, ni elle, ni son mari, en rougissent. (Suétone, Octave, chapitre lxix.)

Nous avons encore une lettre d’Antoine à Auguste, conçue en ces mots : « Ita valeas, uti tu, hanc epistolam quum leges, non inieris Tertullam, aut Terentillam, aut Rufillam, aut Salviam Titisceniam, aut omnes. Anne, refert, ubi, et in quam arrigas ? » On n’ose traduire cette lettre licencieuse.

Rien n’est plus connu que ce scandaleux festin de cinq compagnons de ses plaisirs, avec six des principales femmes de Rome. Ils étaient habillés en dieux et en déesses, et ils en imitaient toutes les impudicités inventées dans les fables :

Dum nova divonim cœnat adulteria.

(Suét., Oct., cap. lxx.)

Enfin on le désigna publiquement sur le théâtre par ce fameux vers :

Viden’ ut cinœdus orbem digito temperet ?

(Ibid., cap. lxviii.)

Le doigt d’un vil giton gouverne l’univers.

Presque tous les auteurs latins qui ont parlé d’Ovide prétendent qu’Auguste n’eut l’insolence d’exiler ce chevalier romain, qui était beaucoup plus honnête homme que lui, que parce qu’il avait été surpris par lui dans un inceste avec sa propre fille Julie, et qu’il ne relégua même sa fille que par jalousie. Cela est d’autant plus vraisemblable que Caligula publiait hautement que sa mère était née de l’inceste d’Auguste et de Julie ; c’est ce que dit Suétone dans la vie de Caligula. (Suétone, Caligula, ch. xxiii.)

On sait qu’Auguste avait répudié la mère de Julie le jour même qu’elle accoucha d’elle ; et il enleva le même jour Livie à son mari, grosse de Tibère, autre monstre qui lui succéda. Voilà l’homme à qui Horace disait (ép. i, liv. II) :

Res italas armis tuteris, moribus ornes,
Legibus emendes, etc.

Il est difficile de ne pas être saisi d’indignation en lisant, à la tête des Géorgiques, qu’Auguste est un des plus grands dieux, et qu’on ne sait quelle place il daignera occuper un jour dans le