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DU PARLEMENT SOUS HENRI II.


Paris, qui par là se trouva pour la première fois juge criminel d’un autre parlement.

Les deux présidents provençaux, l’avocat du roi Guérin, furent emprisonnés. On plaida pendant cinquante audiences ; le vice-légat d’Avignon intervint dans la cause au nom du pape, et demanda, par son avocat Renard, que le parlement eût à ne point juger des meurtres commis dans les terres papales. On n’eut point d’égard à la réquisition de maître Renard.

Enfin, le 13 février 1552, l’avocat général Guérin eut la tête tranchée[1]. Le président de Thou nous apprend que le crédit de la maison de Guise sauva les autres du supplice qu’ils méritaient ; mais que Meynier d’Oppède mourut dans les douleurs causées par les remords, et pires que le supplice.



CHAPITRE XX.


DU PARLEMENT SOUS HENRI II.


Le commencement du règne de Henri II fut signalé par ce fameux duel que le roi, en plein conseil, ordonna entre Jarnac et La Châtaigneraie, le 11 juin 1547. Il s’agissait de savoir si Jarnac avait avoué à La Châtaigneraie qu’il avait couché avec sa belle-mère. Ni les empereurs ni le sénat de Rome n’auraient ordonné un duel pour une pareille affaire ; l’honneur chez les nations modernes n’était pas celui des Romains.

Le parlement ne fit aucune démarche pour prévenir ce combat juridique. Les cartels furent portés par des hérauts d’armes, et signifiés par-devant notaires. Le parlement lui-même en avait ordonné plusieurs autrefois, et ces mêmes duels, regardés aujourd’hui comme un crime irrémissible, s’étaient toujours faits avec la sanction des lois[2]. Le parlement avait ordonné celui de Carouge et de Le Gris, du temps de Charles VI, en 1386, et celui du chevalier Archon, et de Jean Picard, son beau-père, en 1354.

  1. Le président Hénault dit que l’avocat général fut pendu en 1554 : il se trompe sur le genre du supplice et sur la date. Ces horreurs sont détaillées dans l’Essai sur les Mœurs, chapitre CXXXVIII ; on ne peut trop en parler. (Note de Voltaire.)
  2. Voyez, dans l’Essai sur les Mœurs, le chapitre des Duels, tome XII, page 146.