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DU SIÈCLE DE LOUIS XIV.

de Vaud, et qu’ils ne peuvent qu’improuver l’usage qu’on a fait de cette pièce[1] ».

Joseph Saurin mourut en 1737[2], en philosophe intrépide qui connaissait le néant de toutes les choses de ce monde, et plein du plus profond mépris pour tous ces vains préjugés, pour toutes ces disputes, pour ces opinions erronées qui surchargent d’un nouveau poids les malheurs innombrables de la vie humaine[3].

Joseph Saurin a laissé un fils d’un vrai mérite, auteur d’une tragédie de Spartacus[4], dans laquelle il y a des traits comparables à ceux de la plus grande force de Corneille.

Sauveur (Joseph), né à la Flèche en 1663. Il apprit sans maître les éléments de la géométrie. Il est un des premiers qui aient calculé les avantages et les désavantages des jeux de hasard. Il disait que tout ce que peut un homme en mathématique, un autre le peut aussi. Cela s’entend pour ceux qui se bornent à apprendre, mais non pour les inventeurs. Il avait été muet jusqu’à l’âge de sept ans. Mort en 1716.

  1. Il est bon de remarquer que ce certificat est de 1757, vingt ans après la mort de Saurin ; cependant les prédicants suisses voulurent déposer les trois dignes pasteurs qui avaient signé suivant leur conscience : tant la haine théologique est implacable, et tant l’hypocrite intolérance de Calvin a jeté de profondes racines dans les pays qu’il a infectés de son esprit. (K.)
  2. Le 29 décembre.
  3. Dans l’édition de 1757, l’article se terminait ainsi :

    « Depuis que cet article a été composé, j’ai en main la déclaration suivante ; elle doit fermer la bouche à ceux qui ont voulu décrier un philosophe :

    « Nous, les pasteurs de l’église de Lausanne, canton de Berne, en Suisse, déclarons que, requis de dire ce que nous pouvons savoir d’une accusation intentée contre feu H. Joseph Saurin, ci-devant pasteur de la baronnie de Bercher, au bailliage d’Yverdun, et touchant une lettre imputée audit sieur Saurin, dans laquelle il paraît s’accuser d’actions criminelles et honteuses ; ladite lettre et ladite imputation étant imprimées dans les Suppléments aux Dictionnaires de Bayle et de Moréri, nous déclarons n’avoir jamais vu l’origine de cette prétendue lettre, ni connu personne qui l’ait vue, ni ouï dire qu’elle ait été adressée à aucun pasteur de ce pays ; en sorte que nous ne pouvons qu’improuver l’usage qu’on a fait de ladite pièce. En foi de quoi nous nous sommes signés. Ce 30 mars 1757, à Lausanne.

    Signé : Abraham de Crousaz, premier pasteur de l’église de Lausanne, et doyen.

    N. Polier de Bottens, premier pasteur de l’église de Lausanne.

    Daniel Povillard, pasteur. »

    Ce certificat fut attaqué dans le Journal helvétique et Voltaire publia la Réfutation d’un écrit anonyme, etc., qui est dans les Mélanges. Voltaire ne reproduisit pas le certificat en 1763 ; ce fut alors qu’il ajouta l’alinéa sur l’auteur de Spartacus. (B.)

  4. Bernard-Joseph Saurin, auteur de Spartacus, né en 1706, est mort le 17 novembre 1781.