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Ministres de vos volontés,
S’opposent à l’affreuse rage
Des vents contre vous irrités.
Je les vois ; ils sont à la nage,
Et plongés jusqu’au cou dans l’eau ;
Ils conduisent votre bateau,
Et vous voilà sur le rivage.
Gondrin, songez à faire usage
Des jours qu’Amour a conservés ;
C’est pour lui qu’il les a sauvés :
Il a des droits sur son ouvrage.[1]

.



  1. Après le dernier vers de cette pièce, on lit, dans une copie manuscrite, ceux qui suivent :

    Daignez pour moi vous employer
    Près de ce duc aimable et sage,
    Qui fit avec vous ce voyage
    Où vous pensâtes vous noyer ;
    Et que votre bonté l’engage
    À conjurer un peu l’orage
    Qui sur moi gronde maintenant ;
    Et qu’enfin au prince régent
    Il tienne à peu près ce langage :
    « Prince, dont la vertu va changer nos destins,
    Toi qui par tes bienfaits signales ta puissance,
    Toi qui fais ton plaisir du bonheur des humains,
    Philippe, il est pourtant un malheureux en France.
    Du dieu des vers un fils infortuné
    Depuis un temps fut par toi condamné
    À fuir loin de ces bords qu’embellit ta présence :
    Songe que d’Apollon souvent les favoris
    D’un prince assurent la mémoire :
    Philippe, quand tu les bannis,
    Souviens-toi que tu te ravis
    Autant de témoins de ta gloire.
    Jadis le tendre Ovide eut un pareil destin ;
    Auguste l’exila dans l’affreuse Scythie :
    Auguste est un héros ; mais ce n’est pas enfin
    Le plus bel endroit de sa vie.
    Grand prince, puisses-tu devenir aujourd’hui
    Et plus clément qu’Auguste, et plus heureux que lui !