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On te rappelle au séjour bienheureux.
Que les Plaisirs, les Grâces, et les Jeux,
Quand dans Paris ils te verront paraître,
Puissent sans peine encor te reconnaître.
Sois tel alors que tu fus autrefois ;
Et cependant que Sully quelquefois
Dans ton château vienne, par sa présence,
Contre le sort affermir ta constance.
Rien n’est plus doux, après la liberté,
Qu’un tel ami dans la captivité.
Il est connu chez le dieu du Permesse :
Grand sans fierté, simple et doux sans bassesse,
Peu courtisan, partant homme de foi,
Et digne enfin d’un oncle tel que toi.




ÉPÎTRE IV.


À MADAME DE MONTBRUN-VILLEFRANCHE.


(1714[1])


Montbrun, par l’Amour adoptée,
Digne du cœur d’un demi-dieu,
Et, pour dire encor plus, digne d’être chantée
Ou par Ferrand, ou par Chaulieu ;
Minerve et l’enfant de Cythère
Vous ornent à l’envi d’un charme séducteur ;
Je vois briller en vous l’esprit de votre mère
Et la beauté de votre sœur :
C’est beaucoup pour une mortelle.
Je n’en dirai pas plus : songez bien seulement
À vivre, s’il se peut, heureuse autant que belle ;
Libre des préjugés que la raison dément,
Aux plaisirs où le monde en foule vous appelle

  1. Dans le Choix des Mercures, tome XVII, page 68, il est dit que l’auteur composa cette pièce à seize ans. Il en avait vingt en 1714. (B.)