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Aux yeux de l’Anglais consterné,
Va vous donner un Roi des mains de la Victoire.
Pour toute récompense, il demande à vous voir ;
Oubliant ses exploits, n’osant s’en prévaloir
Il attend son arrêt, il l’attend en silence.
Moins il espère, et plus il semble mériter ;
Est — ce à moi de rien disputer,
Contre son nom sa gloire, et surtout sa confiance ?

CONSTANCE

À quoi fuis— je réduite ! Alamir, écoutez :
Vos malheurs font moins grands que mes calamités ;
Jugez — en ; concevez mon désespoir extrême.
Sachez que mon devoir est de ne voir jamais
Ni le Duc de Foix, ni vous-même.
Je vous ai déjà dit à quel point je le hais,
Je vous dis encor plus ; son crime impardonnable
Excitait mon juste courroux ;
Ce crime jusqu’ici le fit seul haïssable,
Et je crains à présent de le haïr pour vous
Après un tel discours, il faut que je vous quitte.

LE DUC DE FOIX

Non, Madame, arrêtez ; il faut que je mérite
Cet oracle étonnant qui paire mon espoir.
Donner pour vous ma vie, est mon premier devoir
Je puis punir encore ce rival redoutable,
Même au milieu des siens je puis percer son flanc,
Et noyer tant de maux dans les flots de son sang ;
J’y cours.

CONSTANCE

Ah ! demeurez, quel projet effroyable !
Ah ! respectez vos jours à qui je dois les miens ;
Vos jours me font plus chers que je ne hais les siens.

LE DUC DE FOIX

Mais est-il en effet si sûr de votre haine ?

CONSTANCE

Hélas ! plus je vous vois, plus il m’est odieux.

LE DUC DE FOIX

se jetant à genoux, et présentant son épée.

Punissez donc son crime en terminant sa peine,
Et puisqu’il doit mourir, qu’il expire à vos yeux.
Il bénira vos coups ; frappez, que cette épée
Par vos divines mains soit dans son sang trempée ;
Dans ce sang malheureux, brûlant pour vos attraits.