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ACTE II, SCÈNE II.

Les chagrins sont pour moi ; la douleur de mon père,
Sa vertu, cet opprobre à ma fuite attaché,
Voilà les déplaisirs dont mon cœur est touché :
Mais vous qui retrouvez un sceptre, une couronne.
Vos parents, vos amis, tout ce que j’abandonne.
Qui de votre bonheur n’avez point à rougir ;
Vous qui m’aimez enfin…

ramire.

Pourrais-je vous trahir ?
Non, je ne puis.

zulime.

Hélas ! je vous en crois sans peine :
Vous sauvâtes mes jours, je brisai votre chaîne ;
Je vois en vous, Ramire, un vengeur, un époux :
Vos bienfaits et les miens, tout me répond de vous.

ramire.

Sous un ciel inconnu le destin vous envoie.

zulime.

Je le sais, je le veux, je le cherche avec joie ;
C’est vous qui m’y guidez.

ramire.

C’est à vous de juger
Qu’on à tout à souffrir chez un peuple étranger ;
Coutumes, préjugés, mœurs, contraintes nouvelles,
Abus devenus droits, et lois souvent cruelles.

zulime.

Qu’importe à notre amour ou leurs mœurs ou leurs droits ?
Votre peuple est le mien, vos lois seront mes lois.
J’en ai quitté pour vous, hélas ! de plus sacrées ;
Et qu’ai-je à redouter des mœurs de vos contrées ?
Quels sont donc les humains qui peuplent vos États ?
Ont-ils fait quelques lois pour former des ingrats ?

ramire.

Je suis loin d’être ingrat ; non, mon cœur ne peut l’être.

zulime.

Sans doute...

ramire.

Mais en moi vous ne verriez qu’un traître
Si, tout prêt à partir, je cachais à vos yeux
Un obstacle fatal opposé par les cieux.

zulime.

Un obstacle !