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Mérope

Il ne l'est point ; j'en crois son ingénuité :
Le mensonge n'a point cette simplicité.
Tendons à sa jeunesse une main bienfaisante ;
C'est un infortuné que le ciel me présente :
Il suffit qu'il soit homme, et qu'il soit malheureux. 
Mon fils peut éprouver un sort plus rigoureux.
Il me rappelle Égisthe ; Égisthe est de son âge :
Peut-être, comme lui, de rivage en rivage,
Inconnu, fugitif, et partout rebuté,
Il souffre le mépris qui suit la pauvreté[1].  
L'opprobre avilit l'âme et flétrit le courage.
Pour le sang de nos dieux quel horrible partage !
Si du moins...



Scène III

Mérope, Égisthe, Euryclès, Isménie.

Isménie

Ah ! Madame, entendez-vous ces cris ?
Savez-vous bien...

Mérope

Quel trouble alarme tes esprits !

Isménie

Polyphonte l'emporte, et nos peuples volages
À son ambition prodiguent leurs suffrages.
Il est roi, c'en est fait.

Égisthe

J'avais cru que les dieux
Auraient placé Mérope au rang de ses aïeux.
Dieux ! Que plus on est grand, plus vos coups sont à craindre !
Errant, abandonné, je suis le moins à plaindre. 
Tout homme a ses malheurs.

(On emmène Égisthe.)

  1. Imitation de Maffei. (K.) — Dans la Mérope de Maffei (acte II, scène II), la
    reine dit : « Hélas! jeune et sans expérience, sans compagnie, ignorant les chemins, les coutumes, et jusqu'aux dangers qui le menaceront, sans appui, pauvre, sans amis... combien de fois... implorera-t—il humblement un secours qu'on lui refusera peut—être! » (B.)