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Je lis au fond des coeurs ; à peine ils sont à moi :
Échauffés par l'espoir, ou glacés par l'effroi,
L'intérêt me les donne ; il les ravit de même.
Toi, dont le sort dépend de ma grandeur suprême,
Appui de mes projets par tes soins dirigés,  
Érox, va réunir les esprits partagés ;
Que l'avare en secret te vende son suffrage :
Assure au courtisan ma faveur en partage ;
Du lâche qui balance échauffe les esprits :
Promets, donne, conjure, intimide, éblouis.
Ce fer au pied du trône en vain m'a su conduire ;
C'est encore peu de vaincre, il faut savoir séduire,
Flatter l'hydre du peuple, au frein l'accoutumer,
Et pousser l'art enfin jusqu'à m'en faire aimer.[1]

  1. Voyez la Mort de César, acte Ier, scène IV, où l’on retrouve le même fonds d’idées, mais avec les nuances qui conviennent à la différence des caractères. L’un parle en tyran ambitieux, l’autre en scélérat.