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moyens qui existèrent subsistent encore, à quoi tient-il donc que les races présentes ne soient ce que furent les races passées ? Ah ! C’est faussement que vous accusez le sort et la divinité ! C’est à tort que vous reportez à Dieu la cause de vos maux ! Dites, race perverse et hypocrite, si ces lieux sont désolés, si des cités puissantes sont réduites en solitude, est-ce Dieu qui en a causé la ruine ? Est-ce sa main qui a renversé ces murailles, sapé ces temples, mutilé ces colonnes ? Ou est-ce la main de l’homme ? Est-ce le bras de Dieu qui a porté le fer dans la ville, et le feu dans la campagne ; qui a tué le peuple, incendié les moissons, arraché les arbres et ravagé les cultures ? Ou est-ce le bras de l’homme ? Et lorsqu’après la dévastation des récoltes, la famine est survenue, est-ce la vengeance de Dieu qui l’a produite, ou la fureur insensée de l’homme ? Lorsque dans la famine le peuple s’est repu d’alimens immondes, si la peste a suivi, est-ce la colère de Dieu qui l’a envoyée, ou l’imprudence de l’homme ? Lorsque la guerre, la famine et la peste ont moissonné les habitans, si la terre est restée déserte, est-ce Dieu qui l’a dépeuplée ? Est-ce son avidité qui pille le laboureur, ravage les champs producteurs et dévaste les campagnes, ou est-ce l’avidité de ceux qui gouvernent ? Est-ce son orgueil qui suscite des guerres homicides, ou l’orgueil des rois et de leurs ministres ? Est-ce la vénalité de ses décisions qui renverse la fortune des familles, ou la vénalité des organes des lois ? Sont-ce enfin