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de l’inondation, de certains vents, de l’époque des pluies, du tems propre à semer chaque espèce de grain : ces hommes, à raison de leur service, furent dispensés des travaux vulgaires, et la société pourvut à leur entretien. Dans cette position, uniquement occupés de l’observation, ils ne tardèrent pas de saisir les grands phénomènes de la nature, de pénétrer même le secret de plusieurs de ses opérations : ils connurent la marche des astres et des planètes ; le concours de leurs phases et de leurs retours avec les productions de la terre, et le mouvement de la végétation ; les propriétés médicinales ou nourrissantes des fruits et des plantes ; le jeu des élémens et leurs affinités réciproques. Or, parce qu’il n’existait de moyens de communiquer ces connaissances, que par le soin pénible de l’instruction orale, ils ne les transmettaient qu’à leurs amis et à leurs parens ; et il en résulta une concentration de toute science et de toute instruction dans quelques familles qui, s’en arrogeant le privilège exclusif, prirent un esprit de corps et d’isolement funeste à la chose publique. Par cette succession continue des mêmes recherches et des mêmes travaux, le progrès des connaissances fut à la vérité plus


hâtif ; mais par le mystère qui l’accompagnait, le peuple, plongé de jour en jour dans de plus épaisses ténèbres, devint plus superstitieux et plus asservi. Voyant des mortels produire certains phénomènes, annoncer, comme à volonté, des éclipses et des comètes, guérir des