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et la création des plantes (qui nourrissent). L’agneau (ou belier) délivre les cieux des génies malfaisans de l’hiver ; il sauve le monde du serpent (emblême de l’humide saison), et il ramène le règne du bien (de l’été, saison de toute jouissance). Le scorpion verse son venin sur la terre, et répand les maladies et la mort, etc., et ainsi, de tous effets semblables ". Ce langage, compris de tout le monde, subsista d’abord sans inconvénient ; mais, par le laps du tems, lorsque le calendrier eut été réglé, le peuple, qui n’eut plus besoin de l’observation du ciel, perdit de vue le motif de ces expressions ; et leur allégorie, restée dans l’usage de la vie, y devint un écueil fatal à l’entendement et à la raison. Habitué à joindre aux symboles les idées de leurs modèles, l’esprit finit par les confondre : alors, ces mêmes animaux que la pensée avait transportés aux cieux en redescendirent sur la terre ; mais dans ce retour, vêtus des livrées des astres, ils s’en


arrogèrent les attributs, et ils en imposèrent à leurs propres auteurs. Alors le peuple, croyant voir près de lui ses dieux, leur adressa plus facilement sa prière ; il demanda au belier de son troupeau les influences qu’il attendait du belier céleste : il pria le scorpion de ne point répandre son venin sur la nature ; il révéra le crabe de la mer, le scarabée du limon, le poisson du fleuve ; et par une série d’analogies vicieuses, mais enchaînées, il se perdit