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LES RUINES.

préposé des agents pour administrer, ces agents s’approprièrent les pouvoirs dont ils n’étaient que les gardiens : ils employèrent les fonds publics à corrompre les élections, à s’attacher des partisans, à diviser le peuple en lui-même. Par ces moyens, de temporaires qu’ils étaient, ils se rendirent perpétuels ; puis d’électifs, héréditaires ; et l’État, agité par les brigues des ambitieux, par les largesses des riches factieux, par la vénalité des pauvres oiseux, par l’empirisme des orateurs, par l’audace des hommes pervers, par la faiblesse des hommes vertueux, fut travaillé de tous les inconvénients de la démocratie.

Dans un pays, les chefs égaux en force, se redoutant mutuellement, firent des pactes impies, des associations scélérates ; et se partageant les pouvoirs, les rangs, les honneurs, ils s’attribuèrent des privilèges, des immunités ; s’érigèrent en corps séparés, en classes distinctes ; s’asservirent en commun le peuple ; et, sous le nom d’aristocratie, l’État fut tourmenté par les passions des grands et des riches.

Dans un autre pays, tendant au même but par d’autres moyens, des imposteurs sacrés abusèrent de la crédulité des hommes ignorants. Dans l’ombre des temples, et derrière les voiles des autels, ils firent agir et parler les dieux, rendirent des oracles, montrèrent des prodiges, ordonnèrent des sacrifices, imposèrent des offrandes, prescrivirent