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CHAPITRE X.

l’esclavage des individus prépara l’esclavage des nations.

Parce que le chef de famille put exercer une autorité absolue dans sa maison, il ne prit pour règle de sa conduite que ses goûts et ses affections : il donna ou ôta ses biens sans égalité, sans justice ; et le despotisme paternel jeta les fondements du despotisme politique. Et dans les sociétés formées sur ces bases, le temps et le travail ayant développé les richesses, la cupidité, gênée par les lois, devint plus artificieuse sans être moins active. Sous des apparences d’union et de paix civile, elle fomenta, au sein de chaque État, une guerre intestine, dans laquelle les citoyens, divisés en corps opposés de professions, de classes, de familles, tendirent éternellement à s’approprier, sous le nom de pouvoir suprême, la faculté de tout dépouiller et de tout asservir au gré de leurs passions ; et c’est cet esprit d’invasion qui, déguisé sous toutes les formes, mais toujours le même dans son but et dans ses mobiles, n’a cessé de tourmenter les nations.

Tantôt s’opposant au pacte social, ou rompant celui qui déjà existait, il livra les habitants d’un pays au choc tumultueux de toutes leurs discordes ; et les États dissous furent, sous le nom d’anarchie, tourmentés par les passions de tous leurs membres.

Tantôt, un peuple jaloux de sa liberté, ayant