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personne ne le savait au juste. C’était un cœur solitaire, d’approche difficile. Depuis son entrée au Louvre, il se dérobait à toute liaison avec ses collègues. Ceux-ci le plaisantèrent d’abord sur sa ressemblance avec certains portraits italiens, ces étudians de Francia ou de Raphaël dont le regard songeur paraît errer plus loin que la pensée de leur temps. Il avait en effet un air de famille avec eux. Bien qu’il ne fût plus tout jeune, ses traits gardaient l’indécision de l’adolescent qui n’a pas encore fait sa mue. On ne pouvait dire qu’ils fussent beaux, il leur manquait quelque chose d’arrêté ; on sentait qu’ils le seraient, une fois fixés dans leur relief définitif. Les plaisanteries sur « l’inconnu du seizième » tombèrent devant sa réserve hautaine. Il voulait être oublié : c’est la seule chose facile à obtenir des hommes. Il était de ceux qui