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cioles dans la nuit de ma pensée, comme une gerbe de flammes au sommet d’une meule dans la campagne nue.

Assis devant le piano, la tête dans les mains, je ne me demandais pas, sur l’instant, quel secret avertissement avait dicté votre choix, ni comment vous connaissiez cette musique. C’était bien mon mal qui s’essorait en notes térébrantes. Je racontais ma vie moi-même, je la revivais toute dans une magique intuition. Comment dire cela ? Je ne raisonnais plus, je ne pensais peut-être pas, je frissonnais. Puis quand j’eus tout oublié, alors je pleurai comme jamais je n’avais pleuré.

Je ne savais pas qu’on pût pleurer ainsi. Je n’étais secoué par aucun spasme. Aucune contraction ne me faisait hoqueter ni verser par saccades un torrent de larmes. Non, c’était tout autre chose et d’infiniment doux. Je pleurais lentement, très lentement sans arrêt.

Les larmes glissaient sur mes joues et là,